L’hebdomadaire français Marianne (numéro 1407) a été interdit de distribution au Maroc, en raison d’un dessin caricatural jugé offensant pour le prophète Mohammad.
Le procès en appel du journaliste franco-marocain Ali Lamrabet, condamné à 4 ans de prison pour "outrage à la personne du roi", a été reporté au 10 juin au terme d’une journée marquée jeudi par de vifs échanges entre la défense et la cour.
La cour a refusé la mise en liberté provisoire demandée par la défense en raison de l’état de santé du journaliste, assis sur un fauteuil roulant, qui a été hospitalisé après la grève de la faim qu’il observe depuis le 6 mai.
La journée a été marquée par les plaidoiries des avocats du journaliste, Me Abderrahim Jamaï et Ahmed Benjelloun, qui ont notamment dénoncé "l’illégalité" de la décision d’incarcération immédiate prise le 21 mai dès la condamnation du prévenu par le tribunal de première instance.
Le code de procédure pénale ne pouvait être invoqué à cet effet, a notamment plaidé Me Jamaï, dans la mesure où le prévenu ne se trouvait dans aucun des cas prévus par la loi pour une incarcération immédiate.
M. Lamrabet a été condamné le 21 mai à quatre ans de prison ferme, à l’interdiction de ses deux publications, Demain Magazine et Doumane (arabophone) et à 20.000 dirhams d’amende (environ 2000 euros) pour "outrage à la personne du roi" et pour atteintes au "régime monarchique" et à "l’intégrité territoriale" du pays.
Un vif échange s’est produit jeudi lorsque le président de la cour a estimé que l’application de l’article 400 du code, invoqué par l’accusation, ne pouvait pas être remise en cause. Cette décision a provoqué les protestations de la défense qui a demandé, mais sans obtenir gain de cause, la récusation pure et simple du juge.
Après une longue interruption, la cour a décidé de ne pas se prononcer sur la requête concernant l’article 400, et a annoncé son intention d’entamer les débats sur le fond.
Un report a alors demandé par la défense - refusé, dans un premier temps, par la cour. Cette dernière a fini par l’accepter devant les protestations des avocats et d’une partie de l’assistance - où se trouvaient des militants des droits de l’Homme, marocains et étrangers, venus soutenir le journaliste.
Plusieurs organisations internationales ont dénoncé cette condamnation, notamment Reporters sans frontières (RSF), dont Ali Lemrabet est le correspondant au Maroc, Amnesty International et la Fédération internationale des journalistes (Fij).
Dans un communiqué publié immédiatement après le report, l’association RSF s’est déclarée "indignée" par le maintien en détention du journaliste, estimant qu’il s’agit "bel et bien de sonner le glas de la presse indépendante" au Maroc.
La Commission européenne a fait savoir jeudi qu’elle suit avec une "grande attention" le procès en appel d’Ali Lamrabet. "Nous espérons que le système judiciaire marocain traitera la question conformément à la loi locale et que le Maroc s’en tiendra également à ses engagements internationaux en matière de droits de l’homme", a indiqué un porte-parole.
AFP