La Suisse accorde de moins en moins d’asile
Les demandes d’asile suisses connaissent une baisse continue depuis plusieurs années. Elles ont atteint leur niveau le plus bas, jamais enregistré depuis douze ans.
Pour résorber l’afflux de réfugiés, des hauts fonctionnaires britanniques proposent de créer des zones régionales de rétention... en Somalie, au Maroc ou en Iran !
Tony Blair va devoir se pencher ces jours-ci sur un étonnant rapport qui a été conjointement concocté par le ministère de l’Intérieur et par son propre cabinet. Intitulé “Une nouvelle vision pour les réfugiés”, ce rapport vise à mieux contrôler le flux de demandeurs d’asile au Royaume-Uni. [Le sujet est devenu extrêmement sensible depuis la mort, le 14 janvier, d’un officier de police lors d’une opération antiterroriste au domicile d’un demandeur d’asile algérien. La presse tabloïd s’est, en effet, emparée de l’émotion suscitée par le meurtre de Stephen Oake pour relancer le débat sur le système d’asile politique britannique, jugé trop laxiste.>
Les hauts fonctionnaires de Sa Majesté proposent donc la création de “zones régionales de protection” vers lesquelles tout demandeur d’asile arrivant à Douvres serait orienté après un interrogatoire, un relevé d’empreintes digitales et une brève détention sur le sol britannique. Mais ces “zones régionales de protection” n’auraient de régionales que le nom, puisque les “régions” envisagées pour leurs installations sont... la Turquie, l’Iran, la Somalie ou le Maroc. Le rapport avance aussi la nécessité d’établir ce type de zones pour les Balkans et le Zimbabwe - tout en reconnaissant que l’affaire sera délicate pour ce dernier cas - qui n’est pas considéré comme problématique par ses voisins.
Ces “zones de protection” serviraient principalement de “centres de traitement des demandes”. Les migrants économiques pourraient y être envoyés après leur arrivée au Royaume-Uni en attendant que leur demande d’asile soit traitée par l’administration britannique. Le rapport, encore confidentiel, précise que “l’envoi des demandeurs d’asile dans des zones régionales de protection devrait avoir un effet dissuasif sur les migrants économiques et les terroristes potentiels qui utilisent la procédure d’asile pour mieux entrer au Royaume-Uni”. Toujours aussi imaginatifs, les services gouvernementaux sollicités ajoutent cependant que “cet effet ne sera véritablement significatif que si les zones ainsi créées sont en nombre suffisant et si les demandeurs ne trichent pas sur leur nationalité pour éviter leur renvoi”. Afin de compléter ce dispositif, le candidat demandeur d’asile ne pourra plus faire appel de la décision de renvoi tant qu’il n’a pas atteint la zone de protection. Il pourra tout de même bloquer son exécution en invoquant devant le tribunal les menaces que cette mesure d’éloignement fait peser sur sa sécurité.
Reste qu’il sera difficile de convaincre les pays évoqués d’accueillir ces zones, même si elles doivent être financées “pour l’essentiel” par un groupe de nations occidentales. Comme “modèle”, le rapport évoque le précédent constitué par le système mis sur pied dans les années 70 pour les réfugiés des guerres de la péninsule indochinoise, les fameux boat people. Le même rapport envisage également l’établissement de “zones de protection” aux frontières de l’UE élargie dans les régions du monde où la demande d’émigration économique vers l’Occident est forte. Le texte évoque, par exemple, des pays comme l’Ukraine ou la Russie.
“Délocaliser” les réfugiés et laisser l’ONU tout gérer
Après un premier interrogatoire destiné à établir leur identité et à les enregistrer, tous les demandeurs d’asile - vrais ou faux réfugiés - se verraient accorder une protection pour six mois. Passé ce délai, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), qui serait chargé de gérer l’ensemble de ces “zones de protection”, aurait à se prononcer sur le bien-fondé de leur requête. Les déboutés seraient bien évidemment expulsés, sans possibilité de recours, par le HCR. A l’issue de cette “délocalisation” forcée, les “vrais” réfugiés ayant des liens dans un pays donné - Royaume-Uni ou autre - pourraient venir s’y installer. La répartition des demandeurs d’asile admis se ferait selon un système de quotas. Enfin, les rédacteurs du rapport conseillent au Premier ministre de faire en sorte que “le nombre de personnes autorisées à s’installer dans notre pays soit plus élevé que le nombre de celles renvoyées dans les zones de protection à leur arrivée. Sinon on pourra nous accuser à juste titre de nous décharger du problème de l’immigration sur le tiers-monde.”
Alan Travis pour The Guardian
Aller plus loin
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