Hassan II a accordé, le 31 mai 1996, une interview aux représentants des deux chaînes de télévision allemandes publique et privée (ARD et ZDF) ainsi qu’au représentant de la radio publique "ARD" également correspondant du grand quotidien "Frankfurter Rundschau". Il s’agit de MM. Samuel Schirmbeck, Gerd Bohmer, et Harald Jung.
Majesté, merci beaucoup de nous avoir accordé cette première, c’est en effet la première fois que votre Majesté reçoit des représentants de la presse allemande. C’est aussi le premier voyage du chancelier Helmut Kohl au Maroc. Est-ce le hasard, l’amitié pour Monsieur Kohl, pour l’Allemagne... ?
Je pense tout simplement qu’en politique, les choses sont un petit peu comme l’agriculture : quand la saison arrive, la saison arrive. Dans ce cas précis, elle arrive un peu tard. J’aurais souhaité en effet qu’entre nous, la coopération, la connaissance, le voisinage intellectuel, civilisationnel, entre le peuple allemand et le peuple marocain aient commencé depuis plus longtemps. J’étais, il est vrai, allé en Allemagne au début de Mon règne. Monsieur le Président Von Weizsaecker est venu me rendre visite ici mais le tout sans grand suivi. Je suis donc très heureux que le chancelier Kohl vienne nous rendre visite, et ensemble, nous allons donner un nouveau départ à la coopération maroco-allemande.
Majesté, au Maroc, on ne parle que de la France, on communique en français. Vous même, vous êtes ami du Président Chirac et l’Allemagne fait un peu pâle figure, vous croyez vraiment qu’on peut rattraper tous ces retards ?
Alors là, c’est Moi qui va poser une question aux politologues et aux historiens allemands : "Pourquoi est-ce que, depuis la disparition de l’Empire, du régime impérial en Allemagne, l’intérêt de l’Allemagne pour l’Afrique et pour le Sud de la Méditerranée a diminué ?" C’est une question que Je pose aux politologues, aux sociologues et aux historiens. En 1905 l’Empereur Guillaume II était venu à Tanger. Il n’y avait pas de port à Tanger. Il a donc accosté à l’aide d’une barque et il a visité la ville du détroit où il a été reçu par Mon grand oncle Moulay Abdelmalek. C’est là que l’Empereur Guillaume II a énoncé trois principes importants : la souveraineté du Sultan du Maroc sur tout le territoire, l’unité territoriale du Maroc et l’égalité, des puissances européennes sur le plan du traitement économique. C’était en 1905.
Je continue : même après la fin de la deuxième guerre mondiale, et lorsqu’il y a eu les deux Allemagnes, l’Allemagne Fédérale n’a pas bougé vers le sud, la RDA, qui était pourtant très active, pour d’autres raisons, est restée elle aussi, frileuse. L’Allemagne a beaucoup bougé en Europe, mais on ne l’a pas rencontrée en Afrique. Depuis la réunification des deux Allemagnes et la chute du mur de Berlin, nous constatons qu’il y a plutôt une tendance en Allemagne pour une action horizontale, plutôt que verticale. Je ne veux pas ouvrir un débat qui pourrait être stérile, chacun pourrait avancer son argument, mais Je pense que nous avons tous les deux raison : l’Allemagne, pays souverain que nous respectons, a raison d’avoir fait ce qu’elle a fait et le Maroc a raison d’avoir fait la politique qu’il a suivie. Mais J’estime qu’ils auraient encore plus raison tous les deux s’ils décidaient de se rapprocher du nord vers le sud et du sud vers le nord.
Majesté, qu’attendez-vous actuellement de l’Allemagne ? Quelles sont les perspectives pour les deux pays sur le plan économique ?
Vous savez, l’économie ne fait que suivre, l’intérêt géopolitique ou ce qu’une carte géographique vous inspire, quand vous regardez une carte géographique, il y a une petite lampe rouge qui s’allume dans votre esprit en disant : tiens, ce pays est bien placé. Tiens, là, il y a un carrefour de circulation aérienne, maritime, terrestre. Nous, nous savons où est l’Allemagne, nous savons ce qu’est l’Allemagne, nous connaissons la population de l’Allemagne, nous connaissons l’histoire de l’Allemagne. J’aimerais qu’une partie de l’Allemagne connaisse un petit peu aussi notre réalité géographique, géostratégique, et notre histoire. Ensuite, l’économique suivra. Si les deux choses peuvent aller ensemble, tant mieux. Mais, pour Moi, la connaissance entre hommes, entre peuples, est tout aussi importante que la coopération économique. Vous êtes un peuple ancien, nous aussi, on peut discuter d’histoire, d’art, de littérature, de nos aïeux, de ce que nous étions il y a mille ans. La réalité et les atouts du présent qu’ils soient de nature politique ou économique s’imposeront alors à nous naturellement.
Majesté, partagez-vous le point de vue de ceux qui reprochent à Bonn de négliger les pays du sud ?
Je ne dirais pas qu’il y a négligence. Je dirais tout simplement que nous aimerions qu’il y ait un peu plus d’intérêt. Je souhaiterais un peu plus d’attention, d’imagination et, peut-être, d’audace en direction des pays du Sud de la Méditerranée.
Plus précisément, qu’espérez-Vous concrètement de cette visite du chancelier allemand ?
J’espère que ce voyage se traduira par la manifestation d’une volonté politique. Je fais Mon métier et Je sais comment le moteur se met en marche : C’est d’abord une volonté politique et, il ne s’agit pas seulement de l’exécutif, du gouvernement, il faut que ce soit en même temps le gouvernement et le parlement. Et Je le répète, il y a une méconnaissance complète du Maroc. Lorsqu’il y a, par exemple, des votes chez vous ou au Parlement Européen, Je reproche aux écologistes, les verts, de se prononcer sur le Maroc sans le connaître. Ils votent sur des choses qu’ils ne connaissent pas.
De quel vote s’agit-il ? R
Au Parlement Européen, par exemple, les verts sont systématiquement contre le Sahara marocain, ils sont contre les résolutions pro-marocaines. Alors que nous, par contre, Je peux vous montrer les discours de Mon père, que Dieu ait son âme, les Miens et tous ceux qui ont été faits aux Nations Unies depuis 1956 jusqu’à nos jours, nous n’avons jamais soutenu la RDA, nous avons toujours soutenu l’unité territoriale et politique de l’Allemagne de la façon la plus solennelle. Revenons aux écologistes, Je souhaiterais qu’ils me disent exactement ce qu’ils reprochent au Maroc ? S’ils veulent venir au Maroc, que nous ayons une explication, Je serais très heureux que nos hommes politiques, nos parlementaires, toutes tendances confondues, puissent avoir avec eux un débat. S’il y a un problème, qu’on le mette à plat, comme une opération chirurgicale. Mais cette obstruction systématique et caricaturale nuit à nos deux pays.
Majesté, quelles sont vos espérances pour l’Europe ?
Je pense que Maastricht, dans quelques années, sera dépassé. Et il sera dépassé, non pas par plus de rigidité, plus de restriction, mais, au contraire, par plus d’élasticité, c’est Ma conviction. Naturellement, il est nécessaire qu’il y ait un Maastricht, parce qu’il faut entrer d’abord dans un cadre, il faut s’organiser. Et puis, ensuite, une fois que chacun est à sa place, qu’on est habitué à vivre ensemble, l’équipe de football, à ce moment là, peut jouer librement. On laisse les joueurs s’épanouir. Donc, pour Moi, l’Europe va s’ouvrir, il y aura l’Europe numéro un, il y aura l’Europe numéro deux qui sera d’une autre couleur, qui sera faite de certains pays européens plus d’autres qui ne sont pas Européens, mais géographiquement plus proches, et ainsi de suite, il y aura des cercles concentriques. Pour l’instant, il y a un club, avec un centre, un noyau dur, et il y a les autres qui sont comme des satellites, amis, ou ayant des traités de coopération ou d’association avec l’Europe. Je pense que, c’est un peu comme les anneaux de Saturne, l’Europe est appelée à changer...
En Europe on considère la rive sud de la Méditerranée menacée dans sa stabilité politique..., quelles sont les conditions susceptibles de stabiliser la région ?
Pour ce qui Me concerne, J’estime que la stabilité dans la région dépend d’abord de chaque pays de cette région. Ce sont des affaires intérieures, de souveraineté de chacun. Mais, voyez-vous, Je n’ai jamais prétendu que le Sud de l’Europe n’était pas stable parce qu’il y avait problème entre la Turquie et la Grèce et parce qu’il y a tous les drames que chacun connaît dans l’ex-Yougoslavie, en Bosnie, et ailleurs... Je n’ai jamais dit que tout le Sud de l’Europe était instable. Alors, permettez Moi de dire que le Nord de l’Afrique n’est pas instable.
Majesté, vous parlez toujours de la réalité de l’Islam. L’Islam, n’est-il pas une religion de la paix ? Qu’est-ce que vous pouvez dire aux téléspectateurs allemands ? Qu’est-ce que veut dire le vrai Islam ?
Il est très difficile d’expliquer, en quelques mots, aux téléspectateurs allemands ce qu’est l’Islam. La malchance de l’histoire a voulu que l’Allemagne n’ait jamais eu de contacts suivis et de proximité avec les pays arabes ou musulmans. Les rapports étaient, il est vrai, très intimes entre l’Allemagne et la Turquie par exemple. Mais, c’était entre deux capitales. L’Islam, chacun le sait, est une religion révélée comme le sont le Christianisme et le Judaïsme. L’Islam apporte les mêmes enseignements, qui sont ceux d’Abraham. L’Islam enseigne l’amour du prochain, l’obligation de légitime défense, mais notre religion enseigne aussi que la paix est encore la meilleure réponse. Vous pouvez le voir chez nous : le Maroc, comme beaucoup de pays arabo-musulmans, assure l’égalité des droits civiques et des droits civils à des gens qui ne sont pas ses citoyens, ou qui ne sont pas de la même religion. Malheureusement, beaucoup de personnes et beaucoup de pays - l’Allemagne n’est pas seule dans le cas - apprennent l’histoire ou la civilisation des autres pays exclusivement par les médias. Je ne peux pas apprendre ce qu’est le Christianisme, le Judaïsme si, par exemple, Je ne me base que sur les journaux qui parlent d’attentats qui ont eu lieu à Jérusalem, en France, en Allemagne ou en Amérique. Je pense que c’est une recherche constante qui doit être l’objectif de tous. Nous devons, vous apporter les éléments nécessaires à la connaissance de l’Islam. Vous devez en Allemagne être ouverts en disant : nous voulons mieux connaître l’Islam. Je pense que c’est un effort commun, mais c’est à nous de commencer parce que c’est nous qui devons défendre notre dossier. Nous sommes musulmans, c’est à nous d’aller vers vous pour cette pédagogie de l’Islam. Et J’espère que beaucoup de savants musulmans, qui m’écouteront ou qui m’entendront, feront un effort particulier vers votre pays.
Ce sont les groupes radicaux islamistes intégristes qui rendent difficile ce rapprochement. Quelle menace représentent vraiment ces groupes ?
Incontestablement, tout intégrisme, c’est-à-dire tout obscurantisme est une menace, mais c’est une menace qui n’apparaît pas nécessairement partout sous le même visage. Certes, nombreux sont les pays qui sont exposés à cet intégrisme, mais chaque pays a ses moyens d’auto-défense, sa culture, sa spécificité, son identité, sa civilisation. Nous, nous avons nos anticorps, nous avons notre médecine. Revenons un instant sur ce qui s’est passé en Bosnie Herzégovine. Aujourd’hui, je lis que l’on recherche des criminels de guerre pour qualifier ceux qui sont les auteurs du massacre de milliers de musulmans. On a trouvé de nombreux charniers, mais personne ne parle d’intégristes, simplement parce que les auteurs de ces massacres avaient des uniformes, des armes automatiques. S’il y avait eu des barbes et des couteaux, on aurait dit c’est de l’intégrisme. Parce qu’il y a des armes automatiques et des uniformes, on considère que ce n’est pas de l’intégrisme... quand on dit : "Je ne veux pas que tu habites avec moi dans la même maison, je veux être tout seul". Voilà l’intégrisme.
Majesté, en Allemagne on dit souvent, que c’est l’ignorance, le manque de culture, ou la crise économique qui engendrent l’intégrisme...
Pas toujours le manque de culture. Vous avez, dans certains pays du Moyen-Orient, des intégristes qui sortent de grandes universités. L’intégrisme n’a pas toujours les mêmes causes, mais il a malheureusement toujours les mêmes effets. Des effets négatifs.
Est-ce que ce n’est pas dur, pour vous, en tant que Roi de constater que vu d’Allemagne, on qualifie la région et l’Islam de la même façon ?
Oui, c’est dur. Ce n’est pas dur en tant que Roi, c’est dur pour Moi, en tant que Musulman. Je n’aime pas que l’on parle de ma religion de cette façon. Et Je ne suis pas le seul.
Y a-t-il des relations entre l’intégrisme et l’économie ?
Dans la plupart des cas, oui.
Quelles sont les relations ?
Il y a des pays qui sont pauvres effectivement. Mais la pauvreté n’est pas une fatalité. La pauvreté peut aussi venir d’une mauvaise gestion de la richesse. Et il y a des mauvaises gestions qui ont leurs répercussions sur le plan social et sur le plan politique. Quand il y a mauvaise gestion, cela veut dire qu’il n’y a pas de contrôle populaire, en général. Quand il n’y a pas de contrôle populaire, il y a dictature. Quand il y a dictature, cela veut dire qu’il n’y a pas de liberté. Manque de liberté plus mauvaise gestion, donc pauvreté : voilà deux éléments qui font quelques fois démarrer l’intégrisme.
L’humiliation aussi, parce que le manque de liberté veut dire humiliation. Les gens disent : qui est le plus grand, le plus fort ? c’est Dieu alors je reviens à Dieu.
Naturellement.
On prétend que des formations islamistes sont solidement ancrées non seulement dans l’université, mais également dans les banlieues, dans les quartiers populaires.
Parlons francs. Il s’agit de Marocains. A l’égard du Roi du Maroc qui est en même temps l’Emir des Croyants, ils sont les égaux des autres, ce sont des sujets Marocains. Tant qu’ils n’auront pas manifesté un ischiisme ou une hérésie et qu’ils se conformeront aux lois et règlements de l’Etat, Je n’interviendrai pas. Ce sont des musulmans comme les autres, ils respectent la loi divine et la loi des hommes, tant qu’il en sera ainsi, Je ne peux pas me permettre de porter un jugement sur eux. Mais permettez-moi de vous dire que ce ne sont pas des intégristes, pas au sens qu’on donne à ce terme dans les dictionnaires politiques actuels.
Majesté, il y a une échéance qui approche, le 31 mai : le mandat de la Minurso va se terminer. Comment voyez-vous l’avenir au-delà du 31 mai ?
J’ai un regret à exprimer qui s’appuie sur deux constatations : La première, c’est que c’est la première fois dans l’histoire des Nations-Unies qu’un plan de paix échoue. Et la deuxième, alors que le monde est à la recherche des unions, des regroupements régionaux, il échoue parce que certains s’évertuent à vouloir créer artificiellement des micro-Etats. J’ajoute, puisqu’il faut être franc, qu’au Conseil de Sécurité, là encore, la voix de l’Allemagne nous a manquée. Cela n’a pas été ce que nous aurions souhaité pour le plan de paix. Enfin, espérons qu’il ne s’agit là que d’un incident de parcours.
Est-ce que vous allez parler de cela avec le chancelier ?
Naturellement, J’en parlerai. En fait, c’est une obligation morale pour Moi en tant que chef d’Etat de lui dire ce que J’en pense au nom de tous les Marocains.
Craignez-vous des développements, disons, plus durs ?
Ecoutez, nous sommes chez nous. Quand on est chez soi, on dépense beaucoup moins que lorsqu’on est à l’hôtel. Il y a des gens qui sont à l’hôtel, et il y a des gens qui sont chez eux. Nous, nous sommes tranquilles.
Votre gouvernement est en train de mener une large campagne contre la corruption, la drogue, la contrebande... Est-ce que vous considérez les résultats obtenus comme suffisants ? cette campagne va-t-elle continuer ?
La finalité de toutes ces opérations n’est pas exclusivement répressive. La logique de cet assainissement est d’abord économique et éthique. Cela dit-on ne va pas continuer avec des procès toujours plus nombreux. Ce n’est pas possible. Ce qu’il faut maintenant, c’est passer à la deuxième étape, l’étape éducative. Il faut que les hommes d’affaires chez nous, les commerçants, petits, grands et moyens, que les industriels sachent qu’avec l’OMC et qu’avec notre traité d’association avec l’Europe, nous allons être soumis à de nouvelles règles. Ces règles sont la compétition, la transparence, la réalité des prix, la qualité...c’est une question de vie ou de mort pour nous. Alors, Nous avons attiré l’attention d’une façon, peut-être, brutale sur des cas qui étaient flagrants. C’était trop gros,...difficile de se taire, mais en même temps, Nous estimons avoir fait acte de pédagogie et Nous espérons que tout le monde comprendra. Du reste, J’ai reçu les responsables de la communauté des affaires, Je leur ai expliqué tout cela, nous avons parlé très franchement. Je leur ai demandé de m’aider à entreprendre cette pédagogie parce que nous ne pouvons pas aborder la concurrence internationale si nous ne sommes pas compétitifs, si nous n’avons pas des produits de qualité, si nous ne sommes pas transparents. Mais de temps en temps, il faut faire beaucoup de bruit pour que les gens se réveillent, et puis qu’ils se disent qu’il faut entrer dans le cadre.
Il y a un autre sujet qui inquiète les Européens et en particulier les Allemands : La question du trafic des stupéfiants, des drogues. Que va-t-il se passer dans ce domaine ?
Il faudrait d’abord que nous nous mettions d’accord sur une chose : le Maroc n’est pas producteur de drogues dures, nous ne produisons ni cocaïne, ni opium. Concernant le cannabis, nous ne sommes pas les premiers producteurs du monde, les Etats-Unis ont des milliers d’hectares ensemencés. S’il n’y avait pas de pays consommateurs de cannabis en Europe, il n’y aurait pas la tentation de le cultiver au Maroc. Mais si le cannabis se vend à trois heures d’avion de Rabat d’une façon libre, la tentation devient trop grande pour les trafiquants. Il faudrait donc que nous soyons tous d’accord sur un minimum de législation. Par ailleurs, nous avons mené une lutte intense contre la drogue ces derniers temps, et nous comptons continuer mais nous ne pouvons pas le faire tous seuls. Il faut absolument que les pays européens nous aident à le faire, et pour cela nous avons demandé leur appui. La France a déjà officiellement avancé un chiffre très important pendant Mon séjour à Paris. J’espère que l’Allemagne fera de même. L’Agence de Développement du Nord, de création récente, va permettre de reconvertir les cultures de cannabis dans cette région. Il est certain que nous pouvons très facilement éradiquer la culture du cannabis. Les entretiens avec le chancelier Kohl permettront peut-être la réalisation de cet objectif. J’évoquerai certainement avec le chancelier la possibilité de la reconversion de la dette marocaine que nous avons contractée à l’égard de l’Allemagne pour qu’elle nous aide à introduire des plantations et des cultures alternatives de sorte que le paysan qui cultivait le cannabis cultive autre chose d’aussi rentable. C’est là le meilleur moyen de lutter contre la drogue, cela nous permettrait d’éponger notre dette et d’introduire d’autres cultures de substitution dans le Nord du pays.
Une autre échéance difficile : vous avez été engagé dans le processus de paix depuis longtemps et vous avez rencontré des personnalités israéliennes quand cela n’était pas, dirais-je, à la mode, quand cela n’était pas encore quelque chose de...
Quand c’était encore dangereux politiquement...
Oui dangereux. Et si vous perdez Pérès par les élections ?
Je ne perdrai pas Monsieur Pérès, il restera toujours vivant et restera toujours Mon ami. Je crains que ce ne soit la paix qui perde Pérès. Je n’ai rien contre le Likoud, Je ne veux pas intervenir dans les affaires internes israéliennes, mais si le Likoud gagnait, Je voudrais être sûr qu’il respectera les accords d’Oslo, qu’il contribuera à créer les conditions d’une coexistence pacifique et fructueuse entre l’Etat d’Israël et le futur Etat palestinien, qu’il respectera toutes les échéances pour une paix honorable, équilibrée, juste et globale. C’est le souhait que Je fais si le Likoud venait à gagner, Je ne sais s’il le fera. Mais s’il gagnait, Je prierais matin et soir pour qu’il le fasse.
31/05/1996
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