La souveraineté du Maroc sur le Sahara est irréfutable si l’on s’en tient aux documents royaux historiques, a affirmé jeudi Bahija Simou, la directrice des Archives royales, lors d’une conférence organisée par l’Association Ribat Al Fath pour le...
Nul ne conteste la vocation du Maroc en tant que terre d’accueil, de tolérance et de cohabitation en bonne intelligence entre différentes cultures et civilisations au fil de l’Histoire de ce pays.
L’ouverture sur l’autre est plus qu’une devise commerciale ou touristique. C’est une réalité indiscutable dont s’enorgueillit le Maroc, pays précurseur en la matière. Mais la tolérance et l’ouverture sur l’autre ne signifient aucunement atteinte aux fondements de l’identité du pays. Or, force est de constater que la frontière entre les deux est fort fragile au Maroc. Il est inadmissible qu’il y ait vide juridique concernant l’usage de la langue arabe dans le secteur privé sous prétexte que les voies du marché sont impénétrables. On ne compte pas à Rabat, Agadir, Casablanca, Marrakech et ailleurs, le nombre de centres commerciaux, de restaurants, cafés, d’enseignes de toutes sortes de professions libérales, de garderies d’enfants…qui affichent sans aucune gêne leur marque commerciale en français seulement comme s’ils se trouvaient en pleine Ile de France.
Vide juridique ou simple laisser-aller ?
Il s’agit là d’une grave anomalie rendue possible grâce à un vide juridique qui ne prévoit rien à l’encontre de l’usage exclusif de la langue française dans le secteur privé. Et quand bien même existerait-il une loi spécifique en la matière, force est de constater que sa mise en application laisse franchement à désirer.
Comment expliquer que la langue arabe soit tout à fait inexistante dans de grands centres commerciaux comme ceux situés sur la route de Zaërs à Rabat par exemple où, parmi les innombrables enseignes flambant neuves des magasins, on n’aperçoit pas un traître mot en arabe, manifestement et malheureusement perçu comme une langue inférieure dans bien des esprits ? Il faut dire que s’il y a laisser-aller qu’on nous présente à tort comme un signe de tolérance et d’ouverture, une frange de la société qu’on définit ou qui se définit comme une « élite » n’est pas à l’abri de reproche. Bien des citoyens marocains agissent en lieu et place des missions françaises et vont presque jusqu’à bannir l’usage de la langue arabe à domicile et à adopter des us et coutumes étrangers à nos traditions. Des traditions de chez nous pourtant valorisées chez ceux là même dont « l’élite » se prévaut.
Il y a donc urgence à agir. Imposer l’usage de l’arabe comme langue première n’est pas négociable. Ça ne devrait pas l’être. Et pour parvenir à affirmer la primauté de l’identité, l’exemple devrait émaner du secteur public lui-même. De prestigieuses institutions dans différents secteurs comme le transport aérien, les phosphates, les holdings…s’entêtent à employer exclusivement la langue française en tout temps même devant un auditoire entièrement constitué de marocains. Difficile dans ces conditions de sévir contre le secteur privé quand le mauvais exemple est donné par le public.
Parler en arabe bourse, exportations, investissements extérieurs, bref marché en général, est perçu par ceux qui détiennent les cordons de la bourse comme une atteinte au bon sens des affaires qui sont incompatibles avec l’idiome d’Al Farazdaq. Bien des gens croiraient déchoir en employant cette langue « inférieure » qui a institué les bases du chiffre et produit le « Commentator » Averroès.
Le cas québécois
Mais quels arguments peuvent présenter les francophiles irréductibles quand l’exemple provient de ceux-là même dont ils se prévalent ? Le cas du Québec, îlot de la francophonie en Amérique du Nord est à ce titre édifiant.
Cernée par un océan anglophone de 300 millions d’individus englobant aussi bien le reste du Canada que les Etats-Unis, la Belle Province fière de son héritage français a mis les bases en 1977 de la loi 101 qui a institué la langue française comme langue officielle du Québec. À ce titre, toutes les correspondances doivent être rédigées dans cette langue, de même que pour les enseignes. Quand bien même s’agirait-il de géants de la distribution, de restauration rapide, de compagnies pétrolières ou autres, la langue française y est en tout temps employée. Mais le succès éclatant de cette politique est imputable à une conjugaison de facteurs. D’une part, le gouvernement du Québec a mis en place un office chargé de contrôler l’application de la loi 101 et sévit lourdement à la moindre entorse au règlement. Même les multinationales ne sont pas épargnées.
Les résultats retentissants de la loi 101 au Québec sont toutefois imputables à un autre facteur dont l’effet est plus déterminant que les règlements en vigueur. Cette loi a remporté l’adhésion populaire et c’est là où réside la clé du succès. Les Québécois sont de farouches défenseurs de leur langue dans un contexte très difficile de voisinage américain.
Voilà pour l’exemple québécois. Quant aux arguments abracadabrants avancés par certains ici qui défendent la thèse suivant laquelle l’arabe ne serait pas une langue propice aux affaires et le contexte géopolitique dans lequel le Maroc est situé impose l’usage prioritaire du français, il est tout simplement indéfendable. Si des pays comme le Liban, l’Arabie Saoudite, les Émirats, l’Égypte… mettent en avant l’arabe quand il s’agit d’affaires, pourquoi n’en serait-il pas ainsi au Maroc.
Pour inverser une tendance qui n’incite pas à l’optimisme, il urge d’agir à diverses échelles pour redorer le blason de l’arabe au Maroc. Formation des cadres, sensibilisation, recours à des coopérants arabes le temps le former la relève, création d’un office ou d’une commission chargée de veiller à la primauté de l’arabe aussi bien dans le secteur public que privé, sanctions contre les récidivistes…C’est juste une question de défense de l’identité. Ni plus ni moins....
L’opinion - Ismaïl Harakat
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