Des fosses communes déterrent un noir passé

1er juin 2008 - 18h03 - Maroc - Ecrit par : L.A

Les bulldozers réussiront-ils là où l’Instance Equité et Réconciliation (IER), chargée de faire la lumière sur les disparus des années noires du règne de Hassan II, a partiellement échoué ? Lors de travaux de construction, deux fosses communes et des restes d’ossements humains ont été découverts, en moins de deux mois, dans trois villes marocaines, théâtres dans les années 60, 80 et 90 d’émeutes réprimées dans le sang.

La série macabre a débuté en mars dans un jardin public en cours de réhabilitation, à Fès : des ossements humains datant d’une époque antérieure aux années 90 ont été mis à jour. Un mois plus tard, à Nador, dans le nord du pays, 16 corps, dont celui d’un enfant de 15 ans retrouvé avec son sac de billes, ont été déterrés à l’occasion de travaux d’extension d’une caserne de pompiers, ancienne annexe des forces auxiliaires de l’armée dans les années 80. Les cartes d’identité et les vêtements retrouvés sur 6 cadavres ont permis de faire remonter les événements aux émeutes étudiantes de juin 1984, parmi les plus violentes qu’ait connues le Maroc. Enfin, début mai, à El Jadida, ville de la côte atlantique, 8 crânes ont été exhumés par les pelleteuses chargées de la construction d’une résidence touristique. Prises de court, les autorités marocaines se sont réfugiées dans le silence en attendant les résultats des enquêtes ADN pour déterminer l’origine des corps exhumés à Fès et El Jadida.

Mais, déjà, ces découvertes relancent la polémique sur le travail de vérité lancé depuis l’accession au trône du roi Mohammed VI, à l’été 2000. En 2005, à l’issue d’un an d’enquête, l’IER, qui a eu à traiter plus de 16.000 dossiers d’atteintes aux droits de l’homme entre 1960 et 1990, avait déclaré ne pas avoir pu faire la lumière sur le sort de 66 disparus (sur un total de 592 morts et disparus durant cette période), évoquant, sans les nommer, le manque de coopération de certains services de sécurité.

« En Amérique latine, en Afrique du Sud, la question des victimes et de la vérité s’est posée dans le cadre d’une transition politique. Le Maroc a essayé de résoudre cette question en gardant le même cadre constitutionnel et en maintenant à leurs places les responsables des exactions. Ceci a ses limites », explique Mohamed Sebbar, président du forum Vérité et Justice. Cette ONG indépendante avait vivement contesté, avec d’autres associations de défense des droits de l’homme, les conclusions de l’IER sur le nombre de victimes liées aux différents soulèvements (325 selon l’IER), tout comme l’incapacité de la commission à localiser les dépouilles des disparus.

« Les découvertes d’aujourd’hui liées au hasard nous confortent dans l’idée que d’autres fosses communes existent comme nous l’avons toujours affirmé », explique le président du forum Vérité et Justice, qui organise aujourd’hui une « caravane » de trois jours à Nador pour exiger que « toute la lumière soit faite sur les disparus et que cette page sombre de l’histoire puisse être ainsi définitivement tournée. »

Source : Libération.fr - Nadia Hachimi Alaoui

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Histoire - Instance Equité et Réconciliation (IER) - Défense - Armement

Ces articles devraient vous intéresser :

Coup d’accélérateur pour la défense marocaine

Le gouvernement marocain a décidé de donner un sérieux coup de pouce à son industrie de défense. Réuni le jeudi 14 novembre, le Conseil du gouvernement a acté l’exonération temporaire de l’impôt sur les sociétés (IS) pour les entreprises du secteur.

Plan de sauvetage des monuments marocains après le séisme

Le ministre de la Jeunesse, de la culture et de la communication, Mohamed Mehdi Bensaid, a assuré vendredi de la forte implication de son département dans le plan de reconstruction des sites historiques touchés par le séisme.

Zones industrielles militaires : les grands projets du Maroc

Le Maroc s’active pour la mise en place d’une industrie de défense robuste. Il dévoile sa stratégie axée sur la création de zones industrielles.

Maroc : des zones militaires interdites de survol

Au Maroc, le survol de plusieurs bases militaires sensibles, notamment la base aérienne de Sidi Slimane (GMSL) et celle de l’aéroport militaire de Salé (GMME) est interdit. En voici la raison.

Découverte exceptionnelle : des épaves centenaires au large du Maroc

Les épaves de neuf navires de l’époque de la Première Guerre mondiale, ont été retrouvés au large du Maroc, a annoncé l’Association marocaine du patrimoine maritime (AMPM).

L’armée marocaine va recevoir ses hélicoptères Apache

Le Maroc se dote d’une arme de pointe. Un hélicoptère AH-64E Guardian Apache aux couleurs de l’armée marocaine a été repéré dans une usine Boeing aux États-Unis. C’est l’un des 24 appareils commandés par le royaume pour un montant de 4,25 milliards de...

Sahara : un drone marocain abattu par le Polisario ?

Des images montrant un drone prétendument marocain abattu par le Polisario dans le Sahara circulent sur les réseaux sociaux. De quoi s’agit-il en réalité ?

Le Maroc s’équipe : avions, chars et systèmes de défense en 2025

Le Maroc investit depuis une dizaine d’années dans le renforcement et la modernisation de son armée, augmentant d’année en année son budget militaire jusqu’à atteindre 133 milliards de dirhams cette année, contre 124 milliards en 2024, soit une...

Des miliciens du Polisario tués par une frappe marocaine

Plusieurs miliciens du Polisario auraient été tués et blessés par une frappe des Forces armées royales (FAR) alors qu’ils tentaient de s’approcher du mur de défense près de la région de Galtat Zemmour, au Sahara.

Maroc : des véhicules suspects relancent les rumeurs sur les lanceurs Patriot

Des indices montrent que le Maroc s’apprête à acquérir des lanceurs du système Patriot, afin de renforcer les capacités défensives des Forces royales Air (FRA).