"Louange à Dieu.
Que la prière et la paix soient sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.
Monsieur le Président de la République du Sénégal.
Messieurs les Présidents.
Excellences, Mesdames et Messieurs.
Permettez-Moi tout d’abord de rendre un hommage appuyé à notre cher frère, Son Excellence le Président Abdoulaye Wade, pour son heureuse initiative de tenir ce forum international, qui réunit, en terre africaine, les acteurs majeurs du développement agricole autour d’un thème fondamental qu’il a si pertinemment appelé la fracture agricole mondiale et le devenir des espaces agricoles en développement.
Nous sommes donc, aujourd’hui, conviés à entreprendre une lecture commune de nos expériences différenciées dans ce domaine pour identifier des pistes d’action collective et d’engagement ferme. Un engagement commun d’ordre à la fois éthique et pratique pour combattre la faim et la pauvreté qui mettent en extrême vulnérabilité des centaines de millions d’individus de par le monde.
Excellences.
Le Royaume du Maroc est particulièrement honoré de voir son expérience retenue parmi les exemples qui seront présentés durant ce forum. Au Maroc, en dépit des conditions climatiques difficiles, l’agriculture reste le pivot du développement dans le monde rural qui représente 45 % de la population du pays. Elle est le plus gros secteur en matière d’emploi, occupant 44% de la population active. Notre politique agricole s’inscrit dans la durée et poursuit le double objectif de sécurité alimentaire et d’intégration au marché mondial, à travers des programmes structurels d’aménagements hydrauliques, de mises à niveau foncières, de mise en valeur des zones agricoles pluviales et d’une série de projets de développement intégrés alliant intensification des productions et amélioration des conditions de vie des populations vivant dans les espaces agricoles et ruraux.
La conduite de cette politique nous a appris que quelle que soit la pertinence des choix, le succès est d’abord tributaire de la qualité de la gouvernance et du degré d’appropriation démocratique et participative des projets par les populations. L’intérêt que nous accordons à l’agriculture est synonyme de l’intérêt que nous portons, depuis longtemps, à la question de l’Eau. L’irrigation d’un million d’hectares, défi lancé, en 1967, par Mon Auguste Père, Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu ait Son âme, est aujourd’hui relevé, puisque, grâce à une planification intégrée et globale au niveau des grands bassins hydrauliques du pays et à la construction de plus d’une centaine de barrages et autres ouvrages hydrauliques, nous avons réussi à mettre plus de 1,2 million d’hectares sous irrigation, ce qui sécurise 45% de la valeur ajoutée agricole et contribue pour les trois quarts de nos exportations agricoles.
Cet effort, fruit d’une volonté politique et d’un consensus populaire, a été réalisé, non sans sacrifices et malgré une succession de périodes difficiles de sécheresse. C’est un acquis qui doit nous inciter à mieux nous armer face à l’ampleur des défis qui restent à relever. Le défi de la vulnérabilité devant l’aléa climatique, conjugué aux multiples fléaux qui menacent nos espaces et nos productions, comme le péril acridien, appelle, en effet, la mise en uvre de nouvelles stratégies à la fois de gestion du risque et de valorisation des ressources. Il en est de même de la protection de l’environnement et de la sauvegarde des écosystèmes agricoles, forestiers et pastoraux, qui incitent à une appropriation effective des principes du développement durable.
C’est pourquoi, nous estimons que la question agricole revêt une dimension internationale et multilatérale évidente. Les espaces démunis ne sauraient, en effet, être laissés pour compte au gré des logiques purement commerciales, sans des mécanismes efficaces de régulation et sans une relation intelligente entre commerce et développement, entre échanges et équité. Le Commerce doit être un levier du développement et c’est à cet effet, que nous sommes tenus, tous, pays du Sud et pays du Nord, de faire aboutir une réflexion commune, au sein des enceintes internationales compétentes, pour un ordre international agricole équilibré et viable et pour des instruments de régulation et de solidarité qui permettent à chacun de mener à bien sa politique agricole et de tirer profit de ses avantages comparatifs.
Excellences.
Mesdames et Messieurs.
La mondialisation est en train de bouleverser aujourd’hui notre conception même de la dépendance et de l’insécurité alimentaires. Elle risque de nous amener, acteurs politiques et territoriaux, par défaut de vigilance, à admettre la fatalité de dépeuplement des espaces ruraux et de dévalorisation des patrimoines agricoles qui ont fait la richesse culturelle et civilisationnelle de nos terroirs.
L’enjeu, dans nos pays, est de faire face, avec efficacité et malheureusement souvent dans l’urgence, aux effets destructurants de cette évolution, qui se traduisent par la rupture d’équilibres écologiques, démographiques, sociaux et politiques. Des effets qui débordent les seuls espaces fragilisés et qui dépassent les capacités mêmes des pays concernés. Il s’agit d’un enjeu planétaire qui requiert une solidarité internationale agissante en vue d’une gestion active et responsable de la transition agricole et rurale, en particulier, dans les agricultures du Sud. Il est certain que la solution ne saurait être celle d’importer à bas prix les surplus alimentaires des pays riches. Cela ne ferait que détériorer la situation des agricultures locales et aggraver la dépendance alimentaire.
Notre ambition est que cette mondialisation puisse aussi offrir de nouvelles opportunités de développement agricole pour nos économies. De telles opportunités devront pouvoir émerger à travers le partage et la diffusion des savoirs et des progrès scientifiques et technologiques, en matière notamment d’agriculture biologique, de sécurité des aliments et de techniques d’amélioration des productivités. Elles le seront aussi à travers l’élargissement réel de l’accès aux marchés et à travers l’élimination des nouvelles formes de barrières au commerce des produits agricoles en provenance des pays en développement.
Excellences.
Mesdames et Messieurs.
Nous ne pouvons nous empêcher de joindre Notre voix à toutes celles qui attirent l’attention sur la situation particulièrement préoccupante de l’Afrique, la seule région du monde qui, durant les dernières années, a connu une régression en matière d’offre alimentaire par habitant, et où plus de deux cent millions de personnes sont exposées à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition.
Nous sommes confiant que la Communauté internationale assumera son devoir collectif et agira pour une inversion heureuse de cette situation, en particulier par le soutien du Continent à la réalisation des Objectifs du Millénaire et de ceux de l’Initiative du NEPAD articulée, pour l’essentiel, autour de la bonne gouvernance locale et nationale et de synergies entre les différents ensembles sous-régionaux.
Le Royaume du Maroc, pour sa part, n’a pas hésité à mettre son expérience et son expertise à la disposition des pays africains frères. Il a ainsi souscrit, sans réserve, au Programme Spécial Sécurité Alimentaire, lancé par la FAO au lendemain du premier Sommet Mondial de l’Alimentation, en envoyant des cadres et des techniciens dans les pays qui ont sollicité ses compétences. Il a également ouvert ses frontières aux produits agricoles des pays les moins avancés du Continent. C’est-là l’esprit de notre engagement international et c’est-là le sens de notre action au sein des instances internationales, et dans le cadre des partenariats régionaux auxquels nous adhérons fortement.
Excellences.
Mesdames et Messieurs.
Un nouveau sursaut soutenu par un sens fort de la solidarité s’avère nécessaire. C’est un nouvel ordre de solidarité qui est à réinventer au sein de la communauté internationale et dans nos sociétés. Qu’elle soit de type Nord-Sud, Sud-Sud, villes-campagnes ou qu’elle vise à concilier des rythmes de développement différents d’un territoire à l’autre, ou encore qu’elle se traduise par une entraide accrue entre les générations, cette solidarité -réelle, active et durable - s’impose à tous. Il s’agit-là d’un devoir collectif dont, J’en suis persuadé, le Forum de Dakar prend la pleine mesure.
Merci pour votre attention".
04/02/2005
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