"Louange à Dieu,
Que la bénédiction et la paix soient sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.
Cher peuple,
Il est de tradition que je m’adresse à toi en ce jour de chaque année en commémoration de la révolution du roi et du peuple.
Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur cet événement, par la grâce de Dieu, notre glorieuse histoire ne l’oubliera jamais et l’on continuera a en faire le thème de bien des écrits il demeurera vivage dans la mémoire nationale qui le transmettra de génération en génération. Dieu a dit : "avertis les hommes car le rappel est utile aux croyants".
Je voudrais commencer mon discours, cher peuple, par ces deux phrases prononcées par mon père, Dieu l’ait en sainte miséricorde, à son retour d’exil. Il avait cité ce verset coranique : "Louange a Dieu qui nous a épargné la tristesse, notre Seigneur est celui qui pardonne et Il est reconnaissant". Puis ce hadith du Prophète sur lui la bénédiction et la paix : "Nous sommes sortis du petit jihad pour entamer le grand jihad"
J’aimerais insister sur ce second point. En effet, nous sommes sortis du petit jihad pour entamer le grand jihad. La journée du 7 aout 1953 fut une journée sombre durant laquelle il n’y avait aucune lueur d’espoir. Les esprits étaient désemparés. Aucun de nous ne pensait que ce jour la serait le point de départ pour de glorieuses et mémorables journées à inscrire en lettres d’or dans l’histoire de notre pays.
Bien des années se sont écoulées depuis, en évaluant le progrès et la prospérité réalisés par le Maroc dans tous les domaines, je constate, grâces en soit rendues à Dieu, que le bilan est positif.
Cher peuple,
Dans un précédent discours, je t’avais fait part de mon intention de proposer un amendement constitutionnel, pour que la loi des finances soit désormais votée à la fin du mois de juin. Je t’avais annoncé, que ce projet d’amendement ferait l’objet d’un référendum, peut être dirait on qu’il s’agit la d’un amendement technique. Je réponds non. Ce n’est pas un amendement technique. C’est un amendement fondamental qui permettra de mieux gérer la situation financière et économique du pays.
Le Maroc compte encore en effet, et comptera pour de nombreuses années, sur son agriculture avant tout. Or notre agriculture est tributaire du climat et, quels que soient nos efforts en faveur de la diversification et du développement de ce secteur, quels que soient nos recherche et programmes, nous avons besoins d’un certain temps avant d’accéder à une situation ou, tout en demeurant primordiale, l’agriculture le sera au même titre que d’autres domaines aussi importants. Nous nous devons d’inclure les revenus agricoles dans notre budget au moment ou nous arrêtons nos prévisions afin d’évacuer de sombrer dans le pessimisme ou, à contrario, pêcher par excès d’optimisme.
Cet amendement n’est pas technique, car le revenu d’une bonne année agricole, atteint 600 à 700 milliards de centimes, un montant qui n’est pas servi par l’État et dont profite toute la nation. Le commerce prospère tout comme les autres transactions et un dynamisme économique s’instaure touchant l’ensemble du peuple marocain et la nation toute entière.
Je te proposerai cher peuple, le vendredi 15 septembre, un amendement constitutionnel prévoyant que le vote de la loi des finances, ait lieu non plus au terme de la session d’avril. J’espère cher peuple, que comme à l’accoutumée, tu répondras "oui", d’abord en signe de confiance dans ce que je te propose, et ensuite par conviction, car il est des vérités que nul ne saurait nier à moins de vouloir philosopher ou faire de l’évidence.
Certes, nous avons connu des difficultés et nous avons du surmonter bien des épreuves, c’est dire que nous n’avons pas connu que des succès, nous n’avons pu gagner certains problèmes. Néanmoins, le Maroc a pu, en dépit de l’insuffisance de ses moyens, développer d’une manière équilibrée les domaines économique et social prenant ainsi des rendez-vous avec l’histoire.
Nombreux étaient ceux qui pensaient que nous n’allions pas réussir aux plan économique et social. Grâce à Dieu, nous avons obtenu ce à quoi nous aspirions et le Maroc est devenu un pays développé, un pays qui ne peut être classé parmi les pays en vois de développement mais bien parmi les pays développés. Nous avons façonné un Maroc qui a le respect de lui même, un pays qui s’est dote d’institutions constitutionnelles démocratiques qui le mènent sur la bonne voie. Certes, il peut être dit, à propos de telles ou telles élections, qu’il y a eu fraude. Ce sont la des questions de forme qui ne changent en rien les constantes constitutionnelles des progrès voulues par le Maroc et par nous même, et qui s’inscrivent dans l’esprit de la révolution du Roi et du peuple. Nous constatons au demeurant, que notre pays étatique toujours au diapason avec nos aspirations.
Oui, en vérité, le bilan est positif. Mais il y a un problème essentiel qui nous préoccupe profondément, qui opère nos finance et menace notre avenir. Je dis et répète, qu’il y a un problème de l’enseignement. Or, il ne peut y avoir de développement sans enseignement, sans hommes qualifiés, sans formation. Allons nous rester dans cet état jusqu’au jour ou le Maroc comptera quarante millions d’habitants ? Le Maroc, sera-t- il à cette échéance, encore capable d’assurer la subsistance, l’emploi et la dignité à tous les citoyens, aux quarante millions d’âmes ?
Je te rappelle, cher peuple, ce problème bien qu’il ne constitue pas le thème de notre discours d’aujourd’hui et je ne cesserai de le rappeler à chaque occasion. Nous sommes un peu dans la situation de quelqu’un qui, arrivé au sommet d’une montagne, et voulant sauter, s’est rendu compte qu’il ne disposait pas de parachute. Le sort qui l’attend dés lors, n’est autre que la chute. Je prie Dieu que mon premier appel et que ce présent rappel soient entendus, je souhaite nous voir engagé sur la bonne voie pour trouver des solutions adéquates dans les plus brefs délais et pour nous rassurer sur l’avenir.
Je ne m’arrêterai pas à cette initiative. En effet, l’année prochaine, je te convierai à une autre consultation. Il s’agira d’un référendum d’une très grande importance qui touchera au fond même de la constitution et du système représentatif marocain. Je te proposerai, cher peuple, l’année prochaine, s’il plait a Dieu, d’approuver un amendement constitutionnel instaurant le système bicameral. Nous aurons une chambre des représentants et une sorte de sénat, une autre chambre dont nous choisirons le nom le moment venu.
Pourquoi te convierais-je l’année prochaine à ce référendum auquel je te demande de bien réfléchir des a présent ? Tout d’abord, la dernière constitution amende évoque, dans l’un de ses articles, la région, or la région ne peut avoir sa pleine signification que si elle est représentée au niveau de la prise de décision et non pas seulement à un niveau consultatif. D’autre part, nous pensons que quels que soient l’activité, le dynamisme et l’émulation de leurs membres, les collectivités locales ne peuvent donner leur pleine mesure tant qu’elles restent éparpillées et tant qu’elles ne seront pas rassemblées avec les corps des métiers au sein d’une assemblée parlementaire ayant les pouvoirs de décision..
Nous pensons que la deuxième chambre donnera à la dénaturalisation sa véritable signification. Nous verrons les régions émettre leurs points de vue, rectifier les erreurs, formuler leurs aspirations. La chambre des représentants se penche dans sa formule actuelle, à la fois sur le général et le particulier. Ceux qui s’intéressent au particulier, aux métiers et aux collectivités locales et qui constituent la masse des fellahs, commerçants, artisans, ouvriers et gens des métiers qui nous assurent notre subsistance quotidienne, qui constituent notre véritable force, ceux la, il n’est pas normal qu’il restent représentés par le tiers seulement, ni qu’ils soient rassemblés au sein d’un conseil purement consultatif comme le conseil économique et social. Il faut leur donner leur chance, leur place véritable au sein d’une assemblée parlementaire ayant pouvoir de décision.
Je n’avais pas répondu auparavant à des doléances qui m’avaient été présentées à ce sujet pour deux raisons. En premier lieu, je continue à garder en mémoire la période durant laquelle le Maroc avait deux chambres. Cette expérience, je ne dis pas qu’elle fut un échec, mais elle avait rencontré des obstacles et je ne voulais pas voir la première constitution.
En deuxième lieu je dois dire que, si je suis prompt à écouter, je prends le temps nécessaire à la réflexion, surtout lorsque je me trouve en présence d’une question qui engage le destin du pays dans ce genre de question, je réfléchis longuement et j’agis promptement. La lenteur de la réflexion vient peut être du fait que je tiens à être convaincu de mon choix avant de te soumettre, car c’est toi en définitive qui a le dernier mot. Avant de te consulter, j’ai cherché à me convaincre moi même pour être fondé à requérir ton adhésion. A présent je suis convaincu.
L’année prochaine, s’il plait à Dieu, je t’adresserai un discours après avoir consulté les uns et les autres. Ce sera le discours d’un convaincu qui cherchera à convaincre. Je n’ai pas le moindre doute que tu as déjà compris l’enjeu de l’amendement et que tu as réalisé en un laps de temps de réflexion et à la lumière des propos que je viens de prononcer devant toi, qu’il s’agira d’un pas qualitatif et quantitatif à franchir. Je suis convaincu que, comme à l’accoutumée, nous serons, cher peuple en parfaite symbiose lors de cette consultation.
Pourquoi cher peuple, ai je évoqué deux amendements à la constitution à cette occasion précisément ? Comme disaient nos ouléma, du hadith du Prophète que la bénédiction et la paix soit sur lui : "Nous sommes sortis du petit jihad pour entamer le grand jihad" pour t’apporter, cher peuple, la preuve éloquente que les mots ont un sens précis et que sortir du petit jihad pour entamer le grand jihad, s’applique toujours à notre cas quarante années après l’indépendance. Telle sera encore notre voie pour des génération. C’est ainsi que nous jugerons les difficultés qui vaincrons les obstacles, c’est ainsi que nous assumerons dignement les lourdes responsabilités qui nous attendent.
Il s’agit, je te l’ai dit, d’assurer aux générations futures l’alimentation, le logement, l’emploi et une vie digne. Il s’agit de veiller à ce que le Maroc demeure un pays respecté aux niveaux régional, continental et mondial. Or, le respect ne peut procéder que d’une seule chose, l’action réfléchie et constante qui assure un mieux être constant. Il s’agit de veiller à emprunter continuellement la voie qui mène du petit jihad au grand jihad.
Actuellement, nous menons un grand jihad. Celui que nous mènerons demain sera grand encore, car les problèmes auxquels le monde fait face ne cessent de s’aggraver aux plans commercial, industriel, politique et militaire. Partout aujourd’hui, nous entendons tonner et canons. La situation dans le monde de demain ne sera pas l’avenir du monde. Les problèmes ne vont pas disparaitre, bien au contraire, ils ont tendance à croitre et à se multiplier. Si nous ne sommes pas capables d’y faire face, si nous ne sommes pas suffisamment armés pour nous défendre et prétendre à une place digne, nous serons régulièrement ramenés à notre point de départ.
Puisse Dieu nous épargner une telle dérive, car autrement nous disparaitrons de la carte en tant que nation jouissant d’un capital de crédibilité et de considération.
Je voudrais, cher peuple, conclure par un hommage que toi et moi rendons à la mémoire de nos martyrs qui, du 20 aout 1953 au 16 novembre 1955, sacrifièrent leurs vie, leur liberté. Je voudrais aussi que nous rendions hommage à nos martyrs tombés au camp d’honneur au Sahara pour défendre notre intégrité territoriale. Je prie Dieu, que son nom soit exhaussé, d’accueillir nos martyrs aux cotés des Prophètes, des apôtres et des saints."
20/08/1995
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