Orly, le 3 janvier 1992, 20 heures. Les téléspectateurs découvrent sur leurs écrans trois êtres hagards, brisés, dont les vêtements neufs et trop amples masquent mal les corps torturés. De leurs regards hallucinés, ils semblent retrouver le monde. De leur voix cassée, ils tentent de répondre aux questions rituelles des journalistes.
C’est qu’ils remontent des enfers, de dix-huit années et demie passées au Maroc dans des geôles secrètes et l’épouvantable bagne de Tazmamart, où ils ont connu le désespoir, la déchéance physique et l’horreur la plus absolue, sans jamais apprendre officiellement le motif réel de leur emprisonnement. Pour des raisons aisées à comprendre, ces pages n’ont pu paraître du vivant du roi Hassan II du Maroc. Sa récente disparition et l’accession au pouvoir de son fils Mohammed VI, en rien comptable du passé mais au contraire porteur d’espoir, rendent aujourd’hui possible leur publication. Puisse ce témoignage inouï, qui magnifie avant tout le courage et l’indestructible volonté de survie face à l’innommable, prouver de manière éclatante qu’en tous lieux, en tous temps, l’esprit peut vaincre la matière !
« J’ai été kidnappé avec mes deux frères au Maroc et séquestré pendant dix-huit ans sans droit ni titre, sans jugement et sans accusation. Nous avons été libérés après dix-huit ans et demi d’incarcération dans le camp de la mort de Tazmamart à la suite d’une pression directe du président américain sur le roi du Maroc et nous avons été rapatriés en France, trois jours après notre libération » Ali Bourequat
Après avoir reçu des menaces en France, à l’époque où Charles Pasqua était ministre de l’Intérieur, Ali Bourequat a obtenu l’asile politique aux États-Unis en 1995. Né en 1937, il vit aujourd’hui en exil au Texas.
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