C’est à cet usage que les professionnels de la communication les destinent. « C’est un moyen de communication qui coûte excessivement cher. C’est pour cette raison qu’il est généralement utilisé pour de la communication institutionnelle », explique Mohamed Boutaleb, general manager de First Class Event (FCE), agence conseil en communication basée à Casablanca. Ces propos sont corroborés par Guy Dimov, DG d’une agence de communication à Rabat, qui fait l’essentiel de son chiffre d’affaires dans l’institutionnel. A ce titre, il a eu recours à des grandes affiches murales dans de nombreuses villes du Royaume, notamment Meknès, Fès et dans les provinces du Sud pour un grand établissement public. « C’est un excellent moyen pour véhiculer l’image de marque d’une institution donnée, surtout si elle est publique », explique-t-il.
Pour Adil Serkouh, ce type d’affichage est, dans certains cas, destiné à de la communication pour des produits de luxe. Ce professionnel de la communication a même flairé le bon filon et a vite fait de constituer une structure entièrement dédiée à l’affichage mural, dénommée Thematik Communication, dont le siège est à Casablanca. « Nous ne sommes pas une agence de communication qui fait de la conception de messages publicité. Nous disposons d’un parc de façades d’immeubles que nous louons aux propriétaires et que nous mettons à la disposition d’éventuels annonceurs après les avoir équipées », précise Adil Serkouh.
Zerktouni, Anfa, Abdelmoumen, Al Massira, les artères les plus chères de Casablanca
L’intérêt de cette activité est tel qu’ils sont de plus en plus nombreux à s’y spécialiser. Younès Lahlou a également décidé de se lancer dans cette aventure en créant son agence Y2L Com. Lancée il y a un peu plus d’une année, cette structure spécialisée dans l’affichage sur site privé compte déjà un parc d’une quinzaine de façades murales exploitées, dont huit se trouvent à Casablanca. « Les contrats de location sont en général négociés et signés avec les syndics de copropriété des immeubles concernés. Pour la quasi-totalité des façades que nous gérons, nous avons eu affaire à des personnes physiques et non à des sociétés de gestion de copropriété », souligne ce spécialiste de l’affichage. Ces contrats sont généralement de longue durée (trois à cinq années) et les loyers sont versés annuellement aux syndics. Cependant, les copropriétaires ne bénéficient pas directement des recettes. En effet, la loi 18-00 qui régit la copropriété au Maroc et qui est entrée en vigueur en 2002 interdit de redistribuer l’argent collecté aux habitants et propriétaires de l’immeuble concerné. L’argent est donc consacré aux charges liées à l’entretien des parties communes, et de l’immeuble en général.
En moyenne, ces façades rapportent aux syndics entre 100 000 DH à 250 000 DH. Mais des sites exceptionnels peuvent rapporter beaucoup plus. C’est le cas par exemple de la façade de l’hôtel Barcelo donnant sur le boulevard d’Anfa, à Casablanca, qui est louée par l’hôtel à 1 MDH. Et ce n’est pas tout. Une autre façade, située à l’intersection des boulevards Zerktouni et Al Massira Al Khadra bat également des records. Elle est proposée à la location pour 2,5 MDH. Un montant qui est jugé trop élevé par les annonceurs qui, malgré l’emplacement exceptionnel de la façade, ne se bousculent pas pour y placer leurs affiches. D’autres façades sur le boulevard Abdelmoumen ou sur le rond-point Espace Porte d’Anfa sont louées entre 600 000 et 900 000 DH.
A Casa, les taxes communales sont passées de 30 000 DH à 145 000 DH pour 100 m2
La fiscalité locale rend la facture plus lourde. En effet, ces affiches sont soumises à des taxes communales, à la charge de l’agence locataire, qui diffèrent d’une ville à l’autre. A partir du 1er janvier 2006, cette fiscalité locale a connu un grand changement. Des hausses allant jusqu’à 500% ont été appliquées pour des villes comme Casablanca. Le nouveau barème pour cette ville est donc de 100 000 DH annuellement pour une façade de moins de 50 m2. Chaque m2 supplémentaire est taxé à 900 DH par an. La taxe sur une façade de 100 m2 par exemple est actuellement de 145 000 DH par an alors qu’elle ne dépassait pas les
30 000 DH avant cette réforme.
Pour autant, le commerce reste juteux et les marges plus que confortables. Exemple : une agence de la place vend à une marque automobile une façade en plein cœur de Casablanca à 500 000 DH par an pour un coût de revient de 175 000 DH seulement.
Malgré la flambée des prix des murs et ceux de l’affiche elle-même, les annonceurs sont toujours aussi nombreux à recourir à ce support de communication qui gagne de plus en plus de villes. Certaines d’entre elles qui, jusque-là, refusaient d’ouvrir les façades de leurs immeubles à la publicité, ont changé d’avis. C’est le cas de Rabat par exemple. D’autres villes encore récalcitrantes lui emboîteront certainement le pas, El Jadida et Marrakech notamment.
Fadoua Ghannam