7ème colloque national des collectivités locales

1er octobre 2008 - 15h45 - 1998 - Ecrit par : L.A

"Louange à Dieu,

Que la paix et la bénédiction soient sur le prophète, sa famille et ses compagnons,

Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Votre colloque d’aujourd’hui se tient assurément au moment opportun et ce pour deux raisons : la première, est que près de trente années se sont écoulées, depuis la promulgation du dahir régissant les municipalités et les communes rurales. La seconde raison, est que le Maroc dispose désormais, conformément à la constitution révisée, de deux chambres au Parlement : la Chambre des Représentants et la Chambre des Conseillers. Avec cette dernière chambre, la mise en place des structures a donc été parachevée et la décentralisation, comme nous l’avions prévu, est partie de la base pour atteindre la région, puis la chambre des conseillers. C’est là un long chemin, certes parsemé d’embûches, mais qui conduit en définitive au succès de cette entreprise.

Messieurs,

Le thème de votre colloque, comprend deux concepts : la décentralisation et la déconcentration. A mon humble avis, la décentralisation est avant tout une culture politique populaire profonde. La décentralisation signifie que nous sommes tous responsables, que nous sommes responsables chacun vis a vis de sa communauté et dans le cadre de ses attributions. Cela veut dire aussi qu’il doit y avoir solidarité dans l’exercice de la responsabilité, une solidarité aux aspects à la fois positif et négatif.

Nous n’avions pas à aller chercher ce genre de décentralisation en dehors des frontières de notre pays. Avant le protectorat, nos illustres ancêtres avaient en effet organisé le Maroc en régions, avec à la tête de chacune, un Khalifa du Sultan. Une telle vision signifie qu’ils étaient parfaitement conscients, comme d’ailleurs l’ensemble des marocains, que la capitale du Royaume ne pouvait à elle seule tout entreprendre. Bien au contraire, la capitale du Royaume, où qu’elle fût à l’époque, Marrakech, Fès ou Meknes, avait nécessairement, au niveau de chaque région, un représentant qui oeuvre de concert avec elle, et avec la collaboration des élites locales : ouléma, combattants, chef des tribus, représentants traditionnels parmi les détenteurs du savoir, de la sagesse, des hommes aux avis pertinents et qui forcent le respect. La décentralisation est donc, telle que je la conçois, une vertu et une valeur éthique héritée.

Autre chose est la déconcentration. elle est le moyen qui permet à l’homme de jouir des bienfaits de la décentralisation. En d’autres termes, la décentralisation c’est le terrain, la déconcentration, c’est le moyen. La décentralisation est une culture. La déconcentration rejette toute attitude négative de repli, d’esprit possessif, voire de monopole. La décentralisation doit impliquer tout le monde et la déconcentration doit prévaloir dans tous les départements ministériels et au sein de toutes les administrations.

Nous devons donc, au cours des travaux de ce colloque, éviter d’éparpiller nos idées en empruntant des voies diverses et sinueuses. Il nous appartient de faire en sorte que la décentralisation ne bute sur les sentiers tortueux et étroits de la déconcentration. A mon sens, cela exige de nous avant tout, une action au niveau du gouvernement et de l’administration. Nous devons demander à tous les départements ministériels et à l’ensemble des services publics d’affecter leurs meilleurs éléments aux provinces et aux régions.

Au niveau des ministères de l’Intérieur et des Finances, nous devons examiner la possibilité d’élargir les attributions de ces fonctionnaires, nos fils bien aimés qui ont été choisis, et qui sont connus avant tout, par leur honnêteté, leur droiture et leur compétence. Nous devons décider de déléguer de nouvelles prérogatives et d’affecter de nouveaux moyens humains et matériels. Nous devons avoir une connaissance, sinon précise, du moins significative, du plan de chaque région pour les cinq années à venir, non pas ce plan rigide et idéologique, qu’a connu l’ex bloc de l’Est, mais un plan qui prend en considération les besoins des populations, les moyens et les potentialités dont disposent la province et la région.

Messieurs,

Je voudrais ici proposer une idée simple mais, je pense, logique et pédagogique. Je propose que le ministère de l’Education nationale inscrit au programme du baccalauréat, une nouvelle matière dénommée ’’Le Fait Local’’. Cette matière -ou ce livre- sera élaborée en fonction de chaque région et de chaque province, retraçant ses potentialités matérielles et humaines et la diversité des mentalités de ses populations. Cette matière sera facultative en ce sens qu’elle ne comptera que pour l’élève qui en a obtenu plus que la moyenne. Quel est le but poursuivi ? Le but, est d’inculquer aux jeunes, l’esprit d’attachement et de suivi des affaires de leur localité. Je ne dis pas que cette nouvelle matière qui viendra enrichir leur pensée et leurs connaissances, les incitera à se spécialiser. Non, mais la carte de leur région, de leur province, de leur municipalité ou de leur commune rurale, les accompagnera durant toute la période de leur scolarité. Que ce jeune embrasse la carrière de fonctionnaire ou qu’il exerce une profession libérale, il restera toujours un citoyen attaché, corps et âme, à sa région, à sa province, à sa municipalité et à sa commune rurale. Si nous formons un tel homme, nous le retrouverons inéluctablement, un jour ou l’autre, que ce soit au sein de l’administration -et nous aurons alors fait l’économie d’un effort considérable de sensibilisation et d’explication- ou en tant qu’élu, président, membre de bureau ou de conseil -et nous aurons alors tissé des liens entre les régions et entre deux acteurs indispensables à la vie démocratique dans ce pays.

Nul doute que notre action dans le domaine de la décentralisation doit être enrichie à l’instar de toute action mature, ayant été entreprise depuis de nombreuses années. Lors de vos travaux, vous allez aborder des questions qui sont nouvelles pour vous. Soyez -que Dieu vous préserve- à la hauteur de la confiance placée en vous. Ce colloque consiste avant tout, à exprimer des avis et des opinions différents. Que chacun de vous soumette à débats son point de vue et sa conception. Les idées pouvant être mises en application seront retenues, tandis que seront consignées celles pouvant être mises en oeuvre à l’avenir. Nous devons aborder la gestion des collectivités locales avec le regard de l’entrepreneur, un regard vigilant et sérieux.

Notre action -celle des collectivités locales- doit être menée loin de toute improvisation. Ses répercussions pourraient être désastreuses pour la plus grande partie d’une ville, sinon pour une cité toute entière, ou une région. A chaque étape de notre action dans le cadre de la décentralisation et de la déconcentration, nous devons faire preuve, avant tout, de transparence. Aucune action entreprise dans ce domaine ne peut être envisagée que dans la transparence. Nous avons engagé une réflexion, avec le ministère de la Justice, pour la création -dans les plus brefs délais, au cours de l’année ou des dix huit prochains mois, s’il plaît à Dieu- des cours des comptes régionales : seize cours des comptes régionales chargées du contrôle des dépenses et des allocations de crédits, et ce par fidélité à la mission dont nous sommes dépositaires et dans le souci primordial de préserver la démocratie. La droiture, la démocratie et l’honnêteté sont des valeurs indissociables et appartiennent toutes à une même famille. On ne peut préférer l’une à l’autre.

Messieurs,

Comme vous avez pu le constater, il est rare que vous me voyez arborer un insigne ou une décoration, mais je suis aujourd’hui heureux et fier de porter ce macaron en signe de solidarité avec tous les nécessiteux dans notre pays. Il s’agit d’une solidarité constante qui ne date pas d’aujourd’hui, ni qui doit naître demain ou après demain, une solidarité qui réside dans notre éthique, notre éducation et notre patrimoine. Poursuivons donc cette campagne et persévérons sur cette voie, sachant que nous allons contribuer non pas à l’éradication de la pauvreté, mais au moins à atténuer les épreuves qu’endurent ceux qui sont dans le besoin. Or, pour lutter contre la pauvreté, il n’y a de meilleur moyen que la régionalisation et la décentralisation des associations de bienfaisance et du mécénat, car -comme dit l’adage- « les habitants de la Mecque en connaissent mieux les méandres ». Ces oeuvres de bienfaisance doivent, en effet, figurer en tête des domaines dont la gestion et l’administration vous incomberont. que cette prière soit la notre, à nous tous : « Dis : seigneur fais-moi atteindre un rivage béni, nul autre que toi ne pourrait mieux le faire »".

19/10/1998

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés :

Ces articles devraient vous intéresser :