22ème anniversaire de la Marche Verte

31 décembre 2008 - 16h31 - 1997 - Ecrit par : L.A

"Louange à Dieu,

Que la paix et la bénédiction soient sur le Prophète, sa Famille et ses Compagnons.

Cher peuple,

Nous voilà aujourd’hui réunis de nouveau pour célébrer le vingt-deuxième anniversaire de la Marche Verte, une marche qui a forcé l’admiration de tous, et qui t’a fait mieux connaître auprès du monde entier. Tu lui es, en effet, apparu comme un peuple plein de vigueur, débordant de maturité et d’enthousiasme, dans un pays où il n’y a aucune distinction entre villes et campagnes, entre jeunes, moins jeunes et personnes âgées. Tu as entamé cette marche avec conviction, le Livre Saint dans une main, ton drapeau rouge frappé de l’étoile verte dans l’autre, et ton cœur empli de patriotisme. Tu as marché, comme nous te l’avions alors recommandé, dans l’ordre et la discipline, franchissant les frontières des provinces spoliées conformé ment à notre souhait commun. Le mi racle s’est produit lorsque nous t’avions par la suite demandé de rebrousser chemin, ce que tu as fait également dans l’ordre et la discipline. Tu as ainsi administré la preuve que lorsque tu décides, tu agis, et lorsque tu t’engages, tu vas de I ’avant.

Nous devons aujourd’hui, cher peuple, alors que plus d’une vingtaine d’années se sont écoulées depuis cette marche, engager une réflexion au sujet de nos frères dans nos provinces du Sud - Je ne dirai pas "provinces sahariennes", le Maroc étant uni, il a son nord, son centre et son sud - dans le passé, nous entendions par "Sud", Guelmim et les régions se situant au sud de cette ville. Aujourd’hui, le "Sud" c’est Laâyoune et au delà ; J’essayerai donc à l’avenir de ne plus utiliser l’expression "provinces sahariennes"

Nous devons analyser quelque peu notre action et nos activités dans nos provinces du Sud et nous poser cet te question : Avons-nous bien réfléchi, lorsque nous avions décidé d’ouvrir des chantiers, de tracer des routes, de construire des ports et des aéroports, d’édifier des écoles, des hôpitaux et des cliniques, de procéder au raccordement du ré seau téléphonique du Sud avec celui du Nord, d’étendre le réseau de la radio et de la télé vision, et lorsque nous avions tenté d’appliquer à ces régions, le mode de vie que nous vivons ?

Avons-nous bien réfléchi à l’époque - et nous avons encore le temps de le faire - au problème suivant : la cellule sahraouie, de la fa mille à la tribu, avait un mode qui lui est propre, respectueuse d’une hiérarchie dans le pouvoir, la consultation et l’arbitrage, dans un climat particulier en matière culturelle, éducationnelle et philosophique.

Est-ce que cette évolution, qui du reste est nécessaire et positive Nous ne pouvons d’ailleurs songer un seul instant en jouir sans en faire profiter nos sujets et nos fils du Sud- s’est déroulée convenable ment ? Les programmes d’enseignement, les programmes sociaux, les programmes de formation, l’intégration de la femme dans la société nouvelle, et l’intégration des éleveurs et des nomades dans la ville, ont-ils été réalisés sans problèmes, apparents ou non ? N’ont-ils pas donné lieu à des contradictions si occultes que même les intéressés ne s’en rendent peut-être pas compte ? Ont-ils généré le bonheur total, sachant qui ils n’ont peut - être pas tenu compte du facteur social que sont la cellule familiale et la cellule tribale ?

Je pense personnellement que quelque chose s’est inévitablement produit. Nous ne devons pas oublier. en effet, que l’histoire du Maroc trouve ses racines dans les provinces du Sud pour ne pas dire sahariennes. Nous ne devons pas oublier qu’il y avait des érudits, des poètes, des Chorfa et des penseurs, qu’il y avait des bibliothèques riches en ouvrages et sources du savoir et de la connaissance. Il y avait également des tribus illustres auxquelles J’ai l’honneur d’appartenir par l’ascendance maternelle, du moins à l’une d’elles, à sa voir Lamghafra.

L’épouse de Moulay Ismaïl, Lalla Khnata, était en effet "Mghafria".

Nous ne devons pas oublier que les Almoravides sont originaires de cet te région où ils ont fait œuvre d’édification. Ces provinces du Sud ne sont peut-être désignées sous le vocable "Sahara" que sur le plan géographique et géologique car durant des siècles, il y avait dans ces régions une civilisation, il y avait de l’eau et des forêts, comme en témoignent les fouilles archéologiques, de l’ancienne Sijilmassa, à Laâyoune, à Boujdour ou à Dakhla. Nous n’avons donc pas récupéré une zone "terranullius", sur le plan humain, ni sur le plan culturel.

Il était évident que certaines inter rogations effleuraient les esprits de tous, jeunes, hommes et femmes, et personnes âgées. Ces interrogations continuent peut-être à se poser.

Est-ce que l’idée de cette réflexion, que Je te demande de partager avec moi, ne m’est venue à l’esprit qu’aujourd’hui ? "Non", Je te dis "non", elle ne date pas d’aujourd’hui. Je réfléchis a cette question depuis des an nées, mais Je n’ai jamais voulu en parler avant de lui avoir assuré le cadre adéquat pour lui trouver des solutions judicieuses et efficientes. Quel est ce cadre ? C’est celui de la région, un rêve qui deviendra réalité. Lorsque les régions auront parachevé la mise en place de leurs structures - ce sera au mois de Chaâbane (décembre) prochain- Je serai en me sure de soumettre l’ensemble de ces dossiers, ces interrogations et bien d’autres questions au débat, à l’examen et au dialogue qui sera, comme d’habitude, ouvert avec nos fils dans les trois régions des provinces du Sud. Par la grâce de Dieu, Je leur rendrai visite après la Fête du Trône avec mes dossiers sous le bras et accompagné de mes experts. Ce sera alors la première expérience du Maroc dans le domaine de la région avec tout ce qu’elle comporte comme aspects humains complexes, comme interrogations sociales, interrogations sur le destin et interrogations sur la formation. Ce sera la première réunion dans le cadre de la régionalisation dont Je parlais depuis des dizaines d’années, la première réunion avec les trois régions de nos provinces du Sud qui ouvrira le dialogue, le débat et permettra le lancement de chantiers.

Je m’adresse à cette occasion aux chers habitants de nos provinces du Sud pour leur dire que nous avons réussi, avec l’aide de Dieu, à conforté notre position quant au droit de tout Marocain originaire des provinces du Sud à s’inscrire - s’il n’a pas eu l’occasion de le faire - sur la liste des personnes devant participer au référendum. Il doit donc se présenter personnellement aux bureaux qui seront ouverts à cet effet, avec le même enthousiasme et la même foi, pour inscrire son nom sur cette liste, ce qui lui permettra de prendre part au référendum à l’instar de ses frères.

Ces interrogations, cher peuple, n’arrêteront nullement notre œuvre d’urbanisation, de création et d’édification. Nous allons adapter notre marche et lui imprimer un cachet à même de préserver à ces provinces du Sud leur identité, leur spécificité, leur génie et réunir les conditions de leur développement dans le cadre de leur patrie, de Lagouira à Tanger et d’Agadir à Oujda.

Telles étaient, cher peuple, quelques idées que nous a inspiré l’anniversaire de la Marche Verte, Je dis bien "Marche Verte" pour la différencier des autres, car l’Histoire du Maroc est, grâce à Dieu, jalon née de marches. Nous devons donc l’appeler Marche Verte pour la distinguer des autres marches, dont celle que nous nous apprêtons à entreprendre, par la grâce de Dieu, le vendredi 14 novembre, une marche au cours de laquelle tu désigneras. cher peuple, au suffrage direct, tes élus qui siégeront à la première Chambre de notre Parlement bicaméral.

Avant de te prodiguer quelques conseils qui sont uniquement d’ordre éthique et patriotique, au sujet de ce scrutin, Je tiens à insister sur un principe, qui doit être solidement ancré dans nos cœurs et nos esprits, compte tenu de la complexité. la diversité et l’enchevêtrement des problèmes à tel point que l’on ne peut dire, aujourd’hui, que tel problème est national, tel autre est régional, continental ou inter national puisqu’en examinant de près une question nationale, on lui découvre des prolongements et des implications qui font qu’elle intéresse la région, le continent ou le monde entier, qu’elle s’inscrit dans le cadre d’un accord international ou dans un nouvel ordre mondial.

En effet, cher peuple, aucun pays, quel qu’il soit, petit ou grand, ne peut prétendre gagner le pari s’il se départit de la voie démocratique, je ne dis pas de la démocratie, mais de la voie démocratique.

La démocratie est une méthode comme bien d’autres, et le vocable démocratie n’est pas la clef qui ouvre toutes les portes pour permettre à l’homme de découvrir des trésors, à offrir ou dont il peut disposer à sa guise. La voie démocratique consiste à bannir cette disparité entre les intellectuels et ceux qui ne le sont pas - Je ne dis pas entre les analphabètes et ceux qui ne le sont pas - mais entre les intellectuels et ceux qui ne le sont pas.

Dans l’ancien concept de la démocratie, il y avait une classe d’intellectuels qui dirigeait, une classe ayant une formation ne dépassant pas les niveaux du primaire ou du secondaire.

Si elle n’est pas assistée par une classe formée de personnes ayant le niveau du primaire ou du secondaire et devant en tout cas savoir lire et écrire pour pouvoir exercer dans tous les domaines : menuise rie, machinerie, plomberie, électricité,. ordinateurs de petite ou moyenne dimensions, la classe des intellectuels, ayant une formation supérieure, ne peut de nos jours assurer à elle seule le décollage nécessaire pour tout développement. Les intellectuels doivent être assurés que leur base est formée, elle aussi de personnes disposant d’un savoir correspondant à leur niveau.

La démocratie est donc une méthode et non une philosophie, une méthode qui doit respecter tous les niveaux de culture et toutes les classes d’intellectuels afin de garantir à tous dignité et respect. La culture du simple ouvrier doit être respectée par celui qui dispose d’une formation supérieure. L’ouvrier ayant une formation du niveau du primaire ou du secondaire doit, pour sa part, jeter les ponts entre lui et l’intellectuel d’un niveau supérieur.

Aucun succès n’est donc possible sans l’adoption de la démocratie en tant que méthode, et la démocratie suppose que chaque catégorie sociale dispose de sa propre culture et de ses propres armes. Il convient ensuite de se poser une question importante :

Comment introduire des réformes à cette méthode démocratique ?

Quelles que soient les lois et les constitutions, la démocratie doit être perçue comme une méthode. une éthique et une pratique. Preuve en est que tous les pays européens - nous prenons le cas de l’Europe puisqu’elle est proche de nous - ont dû procéder à une révision de leur législation visant à organiser la vie intérieure de manière à l’adapter aux réalités continentales et internationales.

La voie démocratique fondée sur la culture avec ses différents niveaux doit être conforme aux intérêts poursuivis, et à la réalité du pays. Elle doit se prêter aux changements. Il ne s’agit évidemment pas de changer pour changer, mais d’introduire des modifications pour atteindre les objectifs escomptés, assurer l’efficacité à l’action, faciliter la mise en application et générer le maximum de bienfaits à l’en semble de la société.

Cette conduite suppose, cher peuple, - et c’est là un conseil que Je te donne - que nous interrogeons nos cœurs avant de nous rendre aux urnes. A un homme qui s’est présenté devant lui pour demander conseil sur son état et ses rapports avec les membres de sa famille, le Prophète Sidna Mohammed a répondu : "scrute ton cœur". Lorsque nous nous rendrons aux urnes chacun de nous doit donc interroger son cœur en se posant deux questions : suis-je convaincu que je vais accomplir un acte patriotique ?. La réponse doit être "oui", car le vote est un devoir patriotique, ce n’est pas un acte de pure forme, il émane plutôt du for intérieur de chacun et ce, pour les raisons que Je t’ai expliquées, car la démocratie est devenue une méthodologie, un moyen et non pas une théorie. Il s’agit de l’unique moyen pour gagner le pari et continuer a vivre dans la dignité.

Donc, la première question que chacun doit se poser est la suivante : suis-je convaincu ? Il faut que chaque citoyen puisse, en effet, aller voter avec conviction.

Deuxième question : cette conviction le conduira-t-elle a faire le bon choix ? Il faut appréhender cette question sous l’angle de l’honnêteté et celui de l’intuition. Concernant le premier aspect, vous connaissez bien ma position à cet égard et vous connaissez les conseils et les orientations que J’ai prodigués en ce sens.

Quant à l’intuition, le Prophète, que la prière et la bénédiction soient sur Lui comme J’affectionne de rappeler ses enseignements, ses recommandations et ses conseils - a dit : "Prenez garde à l’intuition du croyant, car l’intuition du croyant ne se trompe jamais". Nous devons regarder la carte de notre pays et essayer, chacun selon ses capacités, d’imaginer, ne serait-ce que pendant cinq ou dix minutes, un film où apparaissent, dans certains emplacements, villes, villages et régions, les héros marocains qui ont façonné l’Histoire de ce pays. Nous pourrons alors dire que tel est né ou a grandi dans tel lieu, a mené ses activités dans tel endroit, que tel autre qui a vécu à une époque donnée, s’est illustré dans telle ou telle région et ainsi de suite... si nous parvenons à concevoir pareil film historique et se représenter notre pays sur une carte historique lointaine ou proche, ou même une carte historique à dimension prospective, Je suis persuadé que nous aurons cette intuition et que nous aurons la conviction que notre passage au bureau de vote aura été un geste patriotique aussi bien dans la forme que dans notre conscience la plus profonde.

Enfin, si nous voulons couronner toute cette entreprise pour que Dieu perpétue sur notre pays paix et quiétude et continue à l’entourer de sa protection et sa bienveillance, il nous faut tous réciter avant le scrutin et dès aujourd’hui, le verset coranique suivant :

"Seigneur, accorde nous une miséricorde venue de Toi et dispose de notre sort conformément à la voie droite", et cet autre verset : "Si Dieu reconnaît du bien en vos cœurs, il vous comblera de Ses bienfaits".

06/11/1997

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