Les non-dits du TGV

4 novembre 2007 - 13h14 - France - Ecrit par : L.A

Le compte à rebours a-t-il déjà commencé pour la mise en œuvre du projet du train grande vitesse ? A en croire Thi-Mai Tran, directeur du développement à Alstom Transport, il ne tarderait pas à être déclenché. Surtout que le projet est propulsé par la volonté politique des Etats marocain et français. Laquelle volonté est aussi assortie, côté français, d’un financement équivalent à 50% du coût total.

Et les deux parties affirment leur ferme détermination « à déployer leurs meilleurs efforts pour respecter le calendrier prévu pour le projet », est-il expressément souligné dans le protocole d’accord signé le 22 octobre en présence des deux chefs d’Etat. Dès lors, une date butoir est retenue pour la signature des contrats commerciaux relatifs aux études et l’assistance pour mobiliser le reste du financement. A la mi-mars 2008, tout doit être ficelé. Auparavant, et avant même la fin de l’année, les avis d’appels d’offres portant sur l’ingénierie et autres études devront avoir été lancés. « C’est donc aux opérateurs impliqués de s’investir au plus vite », souligne Thi-Mai Tran, rencontrée ainsi que d’autres responsables d’Alstom lors de l’atelier presse organisé par le groupe en Tunisie. Quid alors du timing et du financement ?

Globalement, le projet porte sur la réalisation de 1.500 km de voies exclusivement dédiées au train grande et très grande vitesse. Car le concept retenu est de réduire la congestion à la fois sur l’autoroute et dans les aéroports. Autrement dit, un mode de transport compétitif en rapport avec la voiture et l’avion. Au demeurant, c’est le type de TGV développé par Alstom, principal partenaire du projet. D’après les experts, ces voies dites nouvelles sont clôturées par grillages pour éviter les heurts avec les animaux et ne comportent aucun passage à niveau. A cette exigence d’ordre sécuritaire s’ajoute le coût de la maintenance. Il devient prohibitif au-delà d’une certaine vitesse. Et concerne aussi bien les voies que les caténaires : usure accélérée sous l’effet d’une tension électrique trop élevée. Et c’est dans ce cadre que la collaboration entre l’opérateur marocain, l’ONCF, et la Société nationale des chemins de fer devrait s’investir. Selon Philippe Mellier, président d’Alstom Transport, c’est la SNCF et le Réseau Ferré de France qui se verront attribuer la fourniture du matériel ferroviaire, la formation et l’assistance à la maintenance.

Faut-il déduire que c’est cette partie du projet qui sera couverte par le financement français ? Apparemment non. Et en tout cas, « l’apport du gouvernement français devrait rester confidentiel », tranche le président d’Alstom Transport. D’autant plus que les estimations des coûts, tout comme les délais impartis à chacune des étapes, ne deviendront précises qu’à « la suite de la réalisation de l’étape de définition », signale Thi-Mai Tran. Traduisez le premier tronçon de 200 km devant relier Tanger à Kénitra et dont la mise en service est prévue pour 2013. Cependant, la quantification pour le matériel roulant, la signalisation et la maintenance qui demeurent du ressort d’Alstom est fort aisée.

Elle représente la moitié des coûts estimés à la signature du protocole, soit un milliard d’euros (plus de 11milliards de DH). « Pour Emilio Gallocchio, vice-président responsable de l’Europe du Sud, de l’Afrique du Nord et de l’Asie, qui apporte cette précision, c’est au Maroc de financer l’autre moitié ». Chose qui est à portée, moyennant quelques opérations de valorisation des espaces empruntés par la nouvelle voie, est-il suggéré. Sans donner d’indications sur le tracé qui sera adopté, « la voie du TGV longerait l’autoroute Tanger-Casablanca », révèle Gallocchio.

Selon cet expert qui est passé par tous les métiers ferroviaires, l’itinéraire ne doit poser aucun problème d’ordre topographique. Il est assez plat et point jonché de reliefs insurmontables. Seulement qu’en est-il du statut du foncier à mobiliser ? Relève-t-il à 100% du patrimoine de l’ONCF ? Certainement pas. Aussi faut-il espérer qu’une forte volonté soit aussi de rigueur pour surmonter les difficultés souvent rencontrées à l’occasion de mise en œuvre des procédures d’expropriation. Autant d’autres contraintes qui risquent de peser et sur les coûts et sur le timing.

Pour le moment, seule la date de mise en service de la première étape est connue. Les deux autres, en l’occurrence Kénitra-Casablanca-Marrakech-Agadir et l’axe maghrébin via Rabat-Fès-Oujda sont reléguées à l’horizon 2030/2035. Et donc c’est vers le milieu du siècle en cours que l’on commencera à mesurer la rentabilité du projet, diront les mauvaises langues. N’empêche qu’il cadre parfaitement avec le schéma d’aménagement territorial tel que dessiné par l’ex-département de Mohamed El Yazghi. Tous les grands pôles industriels et touristiques ne seront-ils pas implantés, pour l’essentiel, sur la façade atlantique et la bordure méditerranéenne ?

Carte de visite

Alstom occupe le premier rang mondial dans le ferroviaire. Le groupe est n° 1 des trains à grande et très grande vitesse. Dans le transport urbain, 1 métro sur 4 et 1 tramway moderne sur 3 dans le monde sont d’origine Alstom. Le groupe est aussi n° 2 mondial dans la signalisation et se positionne désormais dans la maintenance du métro. Tout récemment, il a décroché deux contrats longue durée, l’un pour la maintenance du métro de Londres, l’autre pour l’entretien des chemins de fer suisses.

L’Economiste - Abdelaziz Ghouibi

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Sujets associés : France - Transport ferroviaire - TGV - Maroc - Transport en commun

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