Croissance : Le bémol de la Banque mondiale

26 janvier 2008 - 23h40 - Economie - Ecrit par : L.A

Qu’est-ce qui freine, ou du moins ralentit la croissance du Maroc ? A peu de choses près, c’est à cette question que tente d’apporter des réponses le dernier rapport, « Diagnostic de croissance », de la Banque mondiale, considéré encore confidentiel par certains.

Le principe premier des experts de la banque repose sur un constat partagé. Une faible croissance reconnue, mais érigée en question centrale dans le programme de développement du pays.

Au même titre que le HCP (Haut commissariat au plan) et d’autres institutions, la Banque mondiale admet que l’environnement macroéconomique au Maroc a connu une forte amélioration ces dix dernières années. Son argumentaire, lui aussi partagé par d’autres économistes, ressort une inflation limitée (environ 2%), une balance des paiements excédentaire, d’importantes réserves extérieures couvrant 10 mois d’importation ou encore la diminution du ratio de la dette publique par rapport au PIB.

Pour autant, est-ce suffisant pour crier victoire ? Le verdict de la banque, exposé au gouvernement lundi 21 janvier, laisse perplexe. Malgré les améliorations enregistrées par notre économie depuis le début de cette décennie, « la croissance est demeurée faible et inférieure à celle de pays en développement de niveau comparable.

Selon la Banque mondiale, le Maroc s’est retrouvé classé dernier de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) avec une moyenne de 2,5% par an. A noter que durant les années 60, comme le souligne le rapport, « la performance régionale de croissance économique par habitant dans les pays de la région était la plus élevée au monde, avec une moyenne de 5% par an ». Dans cette performance, le Maroc arrivait en 2e position après l’Arabie saoudite. Mais, depuis, en plus de perdre ce rang au cours des années 80, on s’est retrouvé dernier de la classe durant la décennie 90. Une légère reprise enregistrée entre 2000 et 2004, à la faveur d’une série de bonnes saisons agricoles et un taux moyen de 4% ne changeront pas grand-chose à la donne.

Pour les experts de la Banque mondiale, cette embellie « est insuffisante pour réduire la pauvreté et le chômage de façon significative ». Là-dessus aussi, le constat du rapport est on ne peut plus net : « la croissance de la population active marocaine se maintient à plus de 3% par an alors que le taux de chômage officiel stagne à 11% ». Ce qui fait dire à Dania Gressani, vice-présidente de la banque à la tête de la délégation reçue par le Premier ministre, Abbas El Fassi, que « l’accélération de la croissance est nécessaire pour venir à bout de la question du chômage ».

Voilà qui en rajoute une couche. Quand on sait que les experts de la banque sont unanimes à affirmer que « la réduction du chômage au Maroc exigera que la croissance économique franchisse le seuil des 6% par an, pendant plusieurs années ». On savait les nerfs des experts de la banque à fleur de peau, une fois la question de croissance évoquée, mais sans radicalisme. « Sans ce type de croissance, la pauvreté ne pourra pas reculer et les tensions sociopolitiques vont croître ». Bémol.

Depuis 2001, les réformes entreprises connaissent un rythme soutenu, la croissance est entrée dans un cycle d’expansion, le chômage baisse. « C’est une amélioration significative, mais insuffisante pour répondre aux attentes », conclut sans ambages le rapport. C’est la même virulence quand le rapport met en garde, « si cette amélioration n’est pas sensiblement activée, une crise sociale pourrait s’ensuivre ». A noter toutefois que la démarche des experts de la Banque mondiale cherche à répondre aux questions fondamentales par rapport à la croissance économique.

« Comment se fait-il donc qu’un pays qui dispose de tant d’atouts et qui a engagé plusieurs réformes ne puisse pas accélérer son taux de croissance » ? La réponse du rapport de la banque, sous forme de comparaison en dit long : « Sur 83 pays ayant adopté des processus de libéralisation économique similaires entre 1960 et 2000, près de 20% seulement ont connu des périodes de croissance rapide ». Les réformes sont fondamentales, mais ne garantissent pas la croissance. Que nous reproche-t-on ? Notre rythme.

L’Economiste - Bachir Thiam

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