Les prostituées marocaines en France, qui sont-elles ?

3 avril 2007 - 00h00 - France - Ecrit par : L.A

Des réseaux de prostitution de filles marocaines ont élu place en France. Ces filles publiques, blasées et sans ressources sont en général issues de milieux pauvres, Elles ont déjà eu des antécédants au Maroc avant d’aller se prostituer outre mer.

Il y a la légende qui veut que par un matin froid de novembre 93,descendit d’un bus anonyme des voyageurs aux portes de Paris, une jeunefille potelée comme une pêche, les cheveux teintés d’une couleur blonde bon marché, le regard hésitant qui trahit ses 22 ans. Avant de héler un taxi, elle prit soin de se faire composer un numéro de téléphone. Aubout du fil, elle entendit un cri de joie à la fois endormi, mais bien féminin. Puis il y a la réalité, Malika est originaire d’un douar au nom imprononçable dans la banlieue de Casablanca. Après avoir connu très tôt les cafés chics de la ville et les hôtels cinq étoiles, une de ses fréquentations lui susurra dans l’oreille qu’avec vingt mille francs français, sans passeport, sans visa, elle pourrait se retrouver à Paris où les affaires sont plus florissantes. Pour la convaincre, on lui cita des exemples de réussite », telle patronne d’une célèbre pâtisserie, d’un enviable salon de coiffure, d’un réputé lotissement trop bien placé pour être invisible.

La fausse blonde

Malika voyagea à côté du chauffeur qui la couvait de ses yeux gourmands, lui lançant de temps en temps, à voix basse, desplaisanteries salaces, histoire de détendre l’atmosphère. C’est ainsi que sur fond de musique populaire marocaine (un mélange de sheikhate dechâabi et de Raï), le trajet se passa sans incident. Comme par enchantement , aucun garde frontière, aucun douanier, ni Marocain, ni Espagnol, ni Français, ne songea à demander ses papiers à cette fausseblonde au regard ténébreux.

Malika commença l’exercice de son métier parisien dans les night-club orientaux de la capitale. Les affaires marchaient si bien qu’il était rare qu’elle soit obligée de passer la nuit dans la minuscule chambre de bonne que son amie louait dans le 16ème arrondissement. Son premier contact avec les autorités françaises dût arriver quelques mois plus tard. Alors qu’elle opérait dans un petit hôtel de la périphérie d’une célèbre chaîne hôtelière (Campagnile), une descente de police impromptue : vérification d’identité, papiers déclarés perdus... À la grande surprise de Malika, la police se contenta d’établir une fiche de renseignements sur la foi d’informations qu’elle-même a données, une prise d’empreintes et elle est relâchée. Entre-temps, Malika a ouvert un compte dans une banque marocaine qu’elle alimente presque quotidiennement.

Aïcha peut faire l’économie des tracasseries de la clandestinité. Elle est arrivée en France par un circuit classique d’étudiant pour effectuer un troisième cycle dans une obscure discipline. Cheveux noirs très longs, la taille amincie par des années de privations volontaires, le regard pétillant, si elle remplaçait Souad Hamidou dans les séries policières françaises, on n’y verrait que du feu. Après des études suspendues et éternellement recommencées, elle épouse un vieux françaisà la retraite dont elle divorce le temps d’accéder à la nationalitéfrançaise. Aïcha fréquente exclusivement le milieu arabe de Paris et plus particulièrement oriental. Elle parle le libanais, le saoudien et l’égyptien avec une aisance déconcertante, comme une vraie polyglotte. Les proies de prédilection sont particulièrement les gens du Golfe sur lesquels elle sent exercer un magnétisme certain. Elle travaille pour un proxénète tunisien pour qui, semble-t-il, du temps où elle fréquentait le campus universitaire, le coup de foudre était immédiat. Lui, se charge de trouver les clients, de fixer les prix qui peuvent varier selon l’immédiateté des besoins et du standing approché et elle du reste. La commission de son proxénète peut atteindre 50%. Aïcha ne fréquente pas les endroits chauds de la capitale, ne sort pas, ne sefait pas draguer sur les lieux publics. Elle attend patiemment que le téléphone sonne, que tout soit organisé, pour entrer en scène. Une vraie professionnelle. Récemment, elle a fait venir son jeune frère et lui paie des études coûteuses dans un établissement technique privé.

Aïcha voyage souvent au Caire, à Ryad, à Londres ou à Amsterdam. Teldiplomate arabe, tel prince du pétrole, tel financier oriental,organise une soirée. Le proxénète tunisien se charge de l’inscrire aumenu des réjouissances. Loin de ces cimes, Leïla, figure de piètreouvrière. Ramenée en France par un mari marocain qui travaille à laSNCF (les chemins de fer français) à l’âge de 17 ans dans le cadre deregroupement familial, elle a eu un enfant dès sa première année de mariage. Son mari alcoolique la battait, l’enfermait toute la journée àla maison de peur d’être trompé. Un jour, les services sociaux s’ensont mêlés. Elle a obtenu le divorce et la jouissance du domicileconjugal. Le mari, fou de rage et de jalousie sombre dans l’alcoolismemeurtrier et finit par péter les plombs. Il est actuellement enfermédans une prison psychiatrique » avec interdiction formelle d’approcher Leïla et son môme.

Leïla, qui baragouine à peine le français, est de ces beautés paysannes du Maroc avec juste ce qu’il faut de vulgarité pour pimenter un rapportet réveiller les fantasmes et juste ce qu’il faut de docilité pourexciter une envie dominatrice. Leïla ne travaille pas pour un mac maispour une marquerelle marocaine d’une cinquantaine d’année qui a ses quartiers à la porte-de clichy au nord de Paris. C’est cette femme qui, un jour, l’a rencontrée dans un hammam et qui l’a initié à ce métier rentable en la sortant des interminables heures de ménage qu’ellefaisait en noir.

Leïla est devenue une nature prédatrice, le genre de femme qui al’illade fatale. On la voit souvent attablée à longueur de journée dansles cafés chics des champs-Elysées, fréquentées par une clientèle de touristes soucieuse de lever la lièvre rapidement. De son village du Moyen-Atlas, Leïla a gardé la démarche faussement fière, maisterriblement sensuelle. Certes, elle a appris à s’habiller et à semaquiller mais a conservé malgré elle cette maladresse à vouloirabsolument mouler un corps, habitué aux largesses du Kaftan, dans untailleur Chanel. Et si c’étaient ces contrastes involontaires qui larendaient dangereusement efficace ?

La prostitution marocaine est devenue ces derniers temps une rubrique obligatoire du charme parisien. Que seraient les champs Élysées sansces dizaines de filles basanées agglutinées autour des tables du Madrigal » ou du Deauville » à coquette comme despoules et à jeter des regards incendiaires aux alentours ? Que seraient les grands hôtels de Paris sans que, dans la lumière tamisée des Bars, le regard lourd d’une brune à la poitrine généreuse, ne vienne clouer au sol un quinquagénaire aux cheveux grisonnants et à la respiration difficile ?

Proxénitisme

Il est impossible de chiffrer le nombre de filles marocaines qui travaillent dans ce milieu ni de dire par quel miracle elles passent les frontières. Il est clair que beaucoup d’entre elles appartiennent à des réseaux structurés et protégés, susceptibles de leur offrir uneparfaite mobilité et de leur garantir une sécurité. Il n’est pas rareque lors d’une réception mondaine, un banquier ne se penche, sur votre épaule pour vous murmurer à l’oreille en gémissant heureusement qu’il y a les prostituées pour renflouer les « caisses », en vous faisant jurer de ne le répéter à personne. Ce milieu brasse énormément d’argent et les rabatteurs marocains qui s’y activent et dont on tait les noms par pudeur ont des fortunes diverses. On les trouve papillonnant dans les milieux de la banque, de la diplomatie ou des relations publiques.

Le milieu de la prostitution partage avec celui du trafic de drogue oude l’activisme islamiste les mêmes règles de fonctionnement. Une arméede travailleuses laborieuses au service d’une ou d’un caïd. Souvent ces mondes s’entrechoquent au point où souvent l’un instrumentalise les fruits de l’autre. En évoquant le sujet-tabou du Sida, n’importe quelle prostituée marocaine peut vous jurer devant les Dieux de l’Olympe quela préservation est de rigueur.

Sans doute est-ce vrai pour beaucoup, mais devant la terrible concurrence, avec l’arrivée sur le marché de nouvelles recrues souvent mal informées tant elles commenceront à exercer ce métier de plus en plus jeunes, il est permis de s’interroger et même de s’inquiéter. Comme le 13ème arrondissement de Paris ne peut être imaginé sans sa population asiatique, Paris entière ne peut être imaginée sans ses prostituées marocaines. Comme si, dans la géographie des activités marginales et illicites, tandis que certaines communautés monopolisent le trafic des drogues dures, d’autres, le gangstérisme et le racket, les Marocaines se sont accaparées celui de la prostitution. L’explication simpliste voudrait dicter le justificatif de la crise économique que traverse le Maroc. Il y est certes pour quelques chose mais n’explique pas à lui seul la totale domination des Marocaines de ce marché. Y a-t-il autre chose ?

Toxico Quebec - Mustapha Tossa

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Sujets associés : France - Prostitution Maroc

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