Reste à savoir également si l’annonce ne se résume pas uniquement à une « opération-pilote » qui ne concernerait que certains locaux et non la totalité des postes de police. Le projet du ministère de l’Intérieur intervient après la publication par la presse de photos de détenus visiblement malmenés après leur passage par le centre de Témara.
A signaler que plusieurs ONG telles que Human Wright Watch ou encore l’Organisation mondiale contre la torture pointent du doigt, dans leurs rapports, « de nombreux cas de torture au Maroc ». Et ce, « malgré les avancées enregistrées en matière de droit de l’homme depuis l’adoption d’une loi réprimant cette pratique ».
5 à 15 ans de prison pour les tortionnaires
En effet, entrée en vigueur en février 2006, la loi 43-04 relative à la torture punit de 5 à 15 ans de prison et de 10.000 à 30.000 DH d’amende la torture commise par un fonctionnaire public. L’article 231-4 de ce texte va beaucoup plus loin et punit de réclusion perpétuelle celui qui torture un mineur de moins de 18 ans, ou une personne malade ou âgée, infirme, une femme enceinte ou encore lorsque l’acte de torture est accompagné d’un viol.
Cette loi a apporté une grande nouveauté en prévoyant une définition précise de la torture. Il s’agit de tout acte entraînant une souffrance physique ou morale intense. Cet acte doit être commis ou inspiré par un fonctionnaire public ou avec son accord. « La torture est exercée à l’encontre d’une personne pour l’effrayer, l’obliger ou obliger un de ses proches de livrer des informations ou des aveux dans le but de la punir ».
Cependant, cette nouvelle définition est jugée « large » par certains juristes pénalistes. Ces derniers évoquent par exemple le problème de la torture morale. My Taib Cherkaoui, ex-directeur des affaires pénales au ministère de la Justice et actuel procureur général du Roi près la Cour suprême soulignait, lors d’un séminaire sur cette question, tenu à Rabat l’année dernière, « que le nouveau texte peut donner lieu à différentes interprétations. Il faut éviter qu’il ne serve de base légale aux recours abusifs destinés à bloquer la machine judiciaire ».
Pour illustrer ses propos, Cherkaoui cite l’exemple d’une prolongation de la garde à vue, d’un interrogatoire marathon…
Quoi qu’il en soit, l’installation de caméras dans les locaux de la police devrait apporter la preuve de l’existence ou pas de cette pratique au Maroc.
L’Economiste - Naoufal Belghazi