Le chanteur marocain Saad Lamjarred explique les raisons qui seraient derrière la baisse inquiétante du nombre de vues de ses chansons sur la plateforme YouTube.
Sur sa carte de visite, l’inscription « Jalila Bennani, chef de chœur-soprano » trône fièrement au-dessus d’une partition et auprès de laquelle couche une baguette de chef d’orchestre. Ce titre, pas très courant du côté de chez nous, évoque dans notre imaginaire un physique imposant digne de celui des grandes divas. Il n’en est rien. Jalila, un petit bout de femme, n’a pas le physique de sa profession ni de sa voix. Cette jeune femme qui prête sa voix mélodieuses aux grandes compositions de la musique classique déborde de vie. Espiègle et dynamique, elle ne tient pas en place.
Quand on la voit dans la vie de tous les jours, on a du mal à imaginer qu’elle puisse être chanteuse d’opéra. Mais une fois sur scène et que le timbre de sa voix retentit, on ne voit plus qu’elle et on oublie tout le reste. Elle-même s’oublie et se laisse transporter dans les firmaments du plaisir que lui procure le chant et la musique. Elle s’abandonne aux sonorités enchanteresses qui l’entraînent pour se retrouver dans un état second. Chaque mot, par elle prononcé, chaque phrase musicale, chaque émois vocal, la rapproche du nirvana. « Pour moi, la musique c’est l’accomplissement de soi », lance-t-elle sans jamais se départir d’un sourire sans lequel on ne la reconnaîtrait probablement pas.
La musique est surtout partage pour cette soprano qui travaille d’arrache-pied pour atteindre un accomplissement qui n’est jamais au rendez-vous. Cette phrase : « Il faut toujours aller plus loin », Jalila l’érige en credo et en fait un principe qu’elle ne perd jamais de vue. La voie de l’art est faite de recherche constante, de perfectionnement et de partage. Et ça, elle ne le sait que trop bien.
Ce qu’il faut savoir c’est que demoiselle Bennani n’est pas seulement chanteuse mezzo soprano, elle est en même temps chef de chœur. Un titre qui lui demande une énergie supplémentaire qu’elle tente sans cesse de transmettre au public. Si en chantant, elle avoue s’oublier et s’abandonner à la musique, en dirigeant, elle se voit dans l’obligation d’être en éveil permanent pour bien s’acquitter de sa tâche. Cette volonté d’être à la hauteur et cette peur de ne pas y parvenir la met dans état de stress qu’elle perd au contact du public. Ce qui est communément appelée trac chez les artistes, correspond pour elle à l’impression de ne plus rien savoir et de ne pas être à sa place.
Mais dès que ses pieds foulent les planches, la magie du concert fait que toute crainte s’évapore comme par enchantement. Ce qu’elle craint le plus, surtout avant un concert de chant, c’est d’avoir un moment d’égarement et de ne pas maîtriser sa voix. Cette férue de musique et du chant caresse le rêve de voir la musique classique fleurir au Maroc et avoir enfin la place qu’elle mérite véritablement sur nos scènes. Elle appelle de ses vœux qu’on puisse réaliser plusieurs œuvres en arabe et qu’on parvienne à un style nouveau qui permette à des artistes marocains d’écrire plus pour des chœurs et de réaliser des créations nouvelles sans forcément dénaturer la musique traditionnelle. En attendant, elle ne désespère pas de voir son rêve se réaliser. Elle multiplie les concerts et les cours qu’elle prodigue aux jeunes pour leur transmettre sa passion.
Son souhait le plus cher reste, en revanche, de voir le Maroc se doter de structures qui accueillent la musique classique en vue d’assurer la formation de jeunes qui, à leur tour, jetteront les jalons d’une profession à part entière.
En parallèle, elle estime que les parents devraient encourager plus leurs enfants à faire de la musique ou au moins ne pas les empêcher d’en faire quand ils ont en envie. « Il faut que les parents soient en sécurité en voyant leurs petits choisir cette voie », affirme-t-elle. Sa contribution à elle, ce sont les heures qu’elle consacre aux enfants pour leur inculquer cet art. Cela lui procure un plaisir immense. « Un concert au profit de SOS Villages nous a permis de parrainer 15 enfants pour un an. A la limite c’est un bonheur qu’on a partagé avec ces enfants », dit-elle avec une étincelle dans les yeux.
Une ascension fulgurante
Chef de chœur, mezzo-soprano, professeur d’éducation musicale à Rabat. Après des études musicales au conservatoire de la Gendarmerie Royale à Rabat, Jalila Bennani poursuit ses études en chant et piano au conservatoire national de Bordeaux et à l’Ecole normale de Paris en chant. Elle a effectué plusieurs stages, au centre de formation des chefs de chœurs de la Mayenne (France), à l’Opéra comique de Paris auprès d’Yves Parmentier et à l’Académie internationale de Nice auprès de Michel Piquemal.
Depuis 1999, elle dirige deux chœurs d’enfants : la « Chanterie », le chœur d’enfants du conservatoire de la Gendarmerie royale, « Polyphonia » chœur de jeunes, la chorale d’adultes « A chœur Joie Rabat » et le chœur des « Alizés » qui a participé au concert de M. Jarre « L’eau source de vie » sur les dunes de Merzouga en décembre 2006. Régulièrement invitée par la Chorale de Rabat, elle interprète dans les créations de Louis Peraudin le rôle de « Hayat » dans « Freedom of Death » en 2002, le rôle de Diotime dans « La mort d’Orfée » en 2004, le rôle de Lilou dans « Les trois colères de Lilou » en 2007. En mars 2008, elle a interprété le rôle d’Hermion dans Cadmus et Hermione de Lully.
Source : Le Matin - Kenza Alaoui
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