« C’est un pas positif mais encore insuffisant pour la réhabilitation du tamazight », a déclaré mercredi à l’Associated Press Abdellah Hitous, secrétaire général de l’association berbériste Tamaynut (modernité). « En dépit de la volonté d’ouverture du roi Mohammed VI, il existe encore des poches de résistance qui veulent maintenir une vision arabiste de l’identité marocaine », a expliqué M. Hitous.
Qualifié de « révolution » par l’hebdomadaire indépendant « Tel Quel », l’enseignement scolaire effectif de la langue berbère marque une réforme importante dans un pays de 30 millions d’habitants dont entre 50 et 60% sont considérés comme berbérophones.
Après des années d’arabisation à marche forcée au lendemain de l’indépendance, le défunt roi Hassan II s’était engagé dès 1994 à faire entrer le tamazight dans les écoles. Il aura fallu attendre l’avènement de son fils Mohammed VI en 1999 et la création en 2001 de l’Institut royal pour la culture amazighe (IRCAM) pour que ce projet se concrétise.
Lancé à titre expérimental dans 317 écoles du royaume, l’enseignement du tamazight devrait être généralisé d’ici 2013, selon les projections du ministère de l’Education, qui a lancé une vaste campagne de formation de plus d’un millier d’enseignants berbérophones.
Sujet encore très sensible au Maroc, l’identité berbère, « composante essentielle de la culture marocaine », selon le roi Mohammed VI, commence a être reconnue officiellement suite aux efforts d’un puissant réseau associatif qui milite pour « la réhabilitation historique de la berbérité du Maroc et la reconnaissance du tamazight comme langue officielle ».
Témoin des enjeux symboliques de cette question identitaire, le ministère de l’Intérieur avait décidé fin 2002 de faire arracher des panneaux municipaux transcrivant en tifinagh, alphabet cunéïforme berbère, le nom des rue de la ville de Nador (550km au nord-est de Rabat). Selon la Constitution, l’arabe est la langue unique et officielle du royaume.
Habitants originels de l’Afrique du Nord, les Berbères se sont convertis à l’islam lors de l’arrivée des conquérants arabes au VIIIe. L’arabe, langue du livre sacré du Coran, s’est alors progressivement imposée comme langue dominante.
Combattues au lendemain des indépendances du Maghreb, les tensions identitaires liées à « berbérité » sont beaucoup plus vives en Algérie et notamment dans la région de Kabylie, en rebellion larvée avec le pouvoir central depuis mars 2001.
L’autre grande caractéristique de cette rentrée au Maroc, qui concerne un total de 5,9 millions d’écoliers, de collégiens et de lycéens, est la scolarisation à « près de 100% », selon le ministère de l’Education nationale, des petits Marocains âgés de six ans lors de leur entrée en primaire. Un chiffre qui devrait permettre, à moyen terme, de faire disparaître l’analphabétisme qui touche encore 48% de la population.
AP