L’hebdomadaire français Marianne (numéro 1407) a été interdit de distribution au Maroc, en raison d’un dessin caricatural jugé offensant pour le prophète Mohammad.
Ce ne sont pas des paroles en l’air. Ahmed Senoussi Bziz entamera sa grève de la faim pour protester contre 15 ans de censure et d’interdiction du paysage audiovisuel et la scène publique marocains. Malgré les déclarations des responsables des deux chaînes de télévision nationales et des responsables du ministère de l’Intérieur, Bziz affirme que ce ne sont là que des déclarations en l’air qui n’ont aucune espèce de valeur dans le concret.
Bziz, qui a toujours été de tous les combats pour la liberté de la presse, aux côtés des travailleurs, des immigrés et des étudiants dans une lutte féroce pour les droits de l’Homme, revient sur les dérapages des uns et des autres, les vraies fausses rumeurs, le métier de satiriste, la liberté d’expression et le Maroc de demain qui ne devra pas oublier son passé.
quinze ans d’interdiction du paysage audiovisuel marocain au moment où l’on est en passe de tourner une page du passé noir du Maroc. Pourquoi ?
Ahmed Senoussi Bziz : écoutez, aujourd’hui, nous touchons du doigt une terrible contradiction. Nous sommes en train d’absorber à satiété tous les discours sur la liberté, l’ouverture, la transparence, les droits de l’Homme tout en continuant de perpétrer certains aspects d’interdiction, une certaine censure, du sabotage sur des personnes physiques, des associations, des partis politiques qui attendent encore des autorisations... je pense qu’il y a une continuité dans certains agissements relevant de ce même passé noir et plombé qui ont toujours droit de cité. Et ce passé pas simple ni antérieur, se niche dans une certaine mentalité qui ne pourra pas changer ses héritages et les sédiments d’hier. Toute une catégorie de personnages qui pensent que le changement ne sert pas leurs intérêts ni leurs privilèges. Faut-il penser à ces mentalités ou au désir de changement du peuple marocain ? L’heure a bel et bien sonné. C’est un petit début qui n’a rien, je l’espère , avec le marketing politique. Il ne faut pas non plus trop rêver car il y a des rêves qui tournent vite au cauchemar. Et le changement dont je parle est la construction de l’avenir sur la base d’institutions solides que tout le monde respecte à la lettre. Attendre quinze années pour entamer une grève de la faim, il me semble que j’ai fait preuve d’une grande patience et d’un souffle de marathonien. Peut-être que la seule liberté qu’on veut me donner est celle de la mort, la mienne.
On dirait qu’il y a eu un déclic qui a déclenché une décision aussi extrême...
J’ai tout simplement compris que ceux qui me persécutent voulaient utiliser le facteur temps comme outil d’oubli pour minimiser mon combat qui finira par s’évaporer dans l’air. L’adage dit : “il y a tant de choses qui ont été faites grâce à leur oubli”. Ou alors, ceux qui m’interdisent pensent que leur politique est tellement drôle qu’ils n’ont pas besoin d’un humoriste. Le jeu consiste donc pour ceux dont le métier est d’interdire (s’ils ne le faisaient pas, ils pourraient se retrouver au chômage)est de rendre le combat pour la liberté monotone, vulgariser mes protestations pour m’avoir à l’usure. Tout comme on vulgarise les droits de l’Homme comme on le voit pour les victimes du passé. On cherche à faire une transition selon des règles dictées par ceux que cela peut servir. Alors que les grandes transitions historiques se font pour le bien de tous en faisant les comptes du présent et du passé pour préparer demain. C’est ce qui m’a poussé à une telle décision pour que l’être en nous puisse exprimer son point de vue qu’il soit politique ou artistique et quelles que puissent être les idées. Nous sommes à une époque où les peuples du monde ont pris suffisamment de poids pour revendiquer leurs droits les plus élémentaires. Sans oublier que le paradoxe suprême dans cette affaire est que les deux chaînes de télévision nationales sont “sponsorisées” par le peuple marocain. Comment expliquer que les Marocains payent leurs taxes pour financer des télévisions qui leur subtilisent le droit de choisir ce qu’ils veulent voir ou ne pas voir, dire ce qui leur plaît et ce qui les dérange foncièrement, enfin pratiquer la véritable vie de citoyen. C’est en réalité une télévision confisquée puisqu’on t’oblige à la financer sans avoir le moindre droit de regard sur l’information que tu attends. Ce que j’affirme aujourd’hui est que je suis prêt à épuiser jusqu’au bout mon énergie pour défendre mon droit le plus cher dans cette vie : mon droit à une vie dans le respect de qui je suis.
Il y a quelque temps Mostapha Alaoui avait déclaré devant des millions de téléspectateurs marocains vous inviter dans son émission Hiwar. On ne vous y a jamais vu. Que s’est-il passé ?
Vous savez la télévision a coupé court au dialogue deux fois. D’abord elle ne l’avait jamais entamé, ensuite elle a décrété l’arrêt sans sommation de l’émission Hiwar(Dialogue). Vous savez, nous avons écrit avec la commission de soutien pour la levée de l’interdiction sur Bziz au Premier ministre, au ministre de l’intérieur et à d’autres responsables des deux chaînes marocaines, en vain. Et les choses sont simples, ceux qui pratiquent encore ce type d’archaïsme agissent sans laisser de traces de leurs crimes. Les décisions sont en général verbales et aucune empreinte écrite ne pourra un jour venir éclabousser quiconque. La censure et l’interdiction vis-à-vis des personnes physiques, des partis politiques, des artistes se fait toujours de façon orale. Nous avons des preuves sur tout ce que je viens de dire et pas seulement moi-même mais aussi l’AMDH, des associations populaires, des intervenants étrangers, des sociétés d’événementiel, des témoins physiques qui peuvent, par exemple, fournir leurs témoignages pour ce qui s’est passé cette année à Oued Zem. Vous savez, on a créé autour de cela un climat de peur pour que les gens ne travaillent plus avec moi. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi le ministère de l’Intérieur ou la personne chargée de la communication au sein de cet établissement n’a pas fait un démenti ou une mise au point il y a une année après l’interdiction dont j’ai été victime à Oued Zem, à Safi et à Ouarzazate ? Pourquoi avoir attendu tout ce temps pour faire aujourd’hui des déclarations après l’annonce par la presse de ma grève de la faim. On parle aujourd’hui de l’expérience à M’Diq dans le Nord alors que nous avons été humiliés. On nous a coupés l’électricité, nous avons été malmenés par les gardiens qui ont empêché les gens d’assister à la représentation. Et ces personnes peuvent témoigner quand vous le voulez. Et je peux vous montrer la chronologie de toutes ces années d’interdiction.
Qu’est-ce qu’en Ahmed Sanoussi fait peur à ceux qui le censurent et lui interdisent la télévision nationale ? De quoi a-t-on peur encore ?
Il faudra leur poser à eux cette question. Ceci dit, je tiens à rappeler que ce qui doit le plus leur faire peur, c’est l’injustice. Dans un pays où les interdictions de ce type sont encore possibles, ce sont les exactions qui doivent nous faire réagir et non les droits bafoués des citoyens. Pour ma part, je demande à ce que ma voix atteigne mon public et ceci ne devrait pas déranger. Au contraire, le pire est de voir ceux qui commettent les crimes craindre pour leurs privilèges.
Vous êtes un artiste porteur d’un message social qui atteint le coeur même du peuple marocain, c’est de là que viennent toutes les peurs...
Comme je l’ai dit auparavant, quand nous avons un discours qui parle de liberté et d’ouverture et de grands pas vers le futur, il faudra d’abord parler du présent et du passé sans qu’il y ait une coupure-choc entre hier et demain. Nous sommes obligés de nous rappeler de ce qui s’est déroulé dans le passé pour l’éviter à l’avenir. C’est de ce principe que je suis solidaire avec toute personne qui a un message à passer pour le bien de la société où elle vit. Qu’elle soit contre mes idées et principes ou à l’opposé de qui je suis, je suis obligé d’être solidaire avec le droit de chacun à ce qu’il est et à ce qu’il porte en lui comme pensée et création. Pour qu’une société évolue, il faut d’abord tabler sur les opinions des enfants de la nation qui sont porteurs de véritables projets de vrais changements et d’idéaux. Même si toutes ces opinions peuvent être contradictoires et différentes . Elles sont la base pour construire une assise solide pour des institutions viables dans le temps. C’est ce qui fait que je soutiens l’accumulation des productions nationales tout en gardant une porte grande ouverte sur les apports internationaux.
Alors les portes de la télévision sont-elles réellement ouvertes ou pas ?
La question, plus exactement : est-ce que ces fameuses portes sont-elles ouvertes à la liberté d’expression ou à la récupération. Une ouverture sur l’inconnu ne me toucherait jamais. Ce qu’il faut savoir, c’est que lorsqu’il y a une manifestation quelque part et que j’y participe, tout le monde est filmé et enregistré sauf moi. Quand je donne mon point de vue sur telle ou telle activité artistique ou politique, cela ne passe pas sur les chaînes de télévision qui l’ont enregistré. C’est dans ces proportions qu’il faut mesurer le degré de l’interdiction. Des cassettes ont été enregistrées pour des chaînes arabes, mais jamais elle n’ont pu atteindre leur destination comme cette fameuse cassette qui n’a pas pu atterrir à Al Jazeera. Pourquoi ? Vous comprenez que je ne demande aucun privilège, je veux juste ce que tout le monde peut avoir de la façon la plus simple au monde. Il ne s’agit pas de me faire un cadeau. J’ai le droit d’exercer mon métier et on m’empêche de le faire. C’est là le fond de la question. C’est celui qui veut posséder la vérité absolue qu’il faut empêcher de sévir... Le sentiment de liberté dont je parle n’est pas tributaire non plus de mes productions. Je peux ne pas produire tout en me sentant libre de le faire quand cela s’imposera à moi. Vivre dans l’incapacité de faire son art et son métier, est un crime.
On lit pourtant dans la presse que vous avez été contacté par une société de production, qu’on vous a proposé des choses et on avance même une somme d’argent de la TVM (1 ère chaîne) que vous auriez rejetée.
Ce qui se dit n’a aucune espèce de véracité. Des inventions pour noyer le poisson dans l’eau et rien d’autre. Rien de concret ne peut prouver ce que ces personnes avancent comme allégations. Nous avons, moi-même, la commission de soutien, des journalistes, des avocats, des inttelectuels... écrit au directeur de la TVM, mais nous n’avons jamais reçu de réponse à notre courrier. Et ceci date de deux mois pour être précis. Quand le directeur avance aussi qu’il m’a fait une proposition de travail avec une somme donnée d’argent, je tombe des nues, puisque je n’ai aucune idée de ce qu’il dit. C’est le comble de l’absurde. Il parle sûrement d’une chose qui a été élaborée entre lui et une société de production et ceci n’engage en rien ma personne. Si l’on supposait que les intentions sont bonnes pour ouvrir la voie devant tous les créateurs et les intellectuels, il faudra le faire aussi dans un rapport à des institutions et non à des personnes. Les personnes s’en vont et les institutions restent.
Quand j’écrit à un ministre sans jamais avoir de réponse sur mes interdictions et que je constate qu’il a fallu que j’annonce ma grève de la faim pour que les gens commencent à donner de la voix, ceci ne me réjouit pas. On tue la personne et on pelure à son enterrement
Pour vos spectacles, vous avez besoin d’autorisation de la part des autorités...
Vous savez rien que le mot autorisation est anti-liberté. Pour s’exprimer, parler, avancer ses idées et principes, nous avons besoin d’autorisation... c’est lamentable. J’accepte qu’il y ait une déclaration ou un Tasrih pour pouvoir monter un spectacle. Et quand on dit autoriser, cela crée d’emblée des séparations puisque l’on peut permettre à tel de faire ce qu’il veut et empêcher tel autre de le faire. Aujourd’hui au Maroc (et je tiens à ce que vous mettez noir sur blanc ce que je veux dire et j’en prends l’entière responsabilité)nous avons besoin d’une Intifada culturelle pour la création artistique avec une presse indépendante et une justice indépendante. Car un pays avec une presse et une justice indépendantes, je tiens à le répéter, est un pays qui ira loin. Il n’y a rien à craindre pour un pays qui s’arme de deux valeurs aussi fortes. Ce qui se passe aujourd’hui c’est qu’il y a une minorité qui veut continuer à opprimer une majorité, et ceci ne peut jamais aboutir à rien de bon pour ce pays. Il faut que la majorité au Maroc soit sa minorité pour que ce pays fasse des pas en avant. Il y a des prémices, mais il faut persévérer et donner le meilleur de soi pour que cet état de fait change.
On constate aussi que vous n’êtes pas dans une logique de défense de soi, mais que votre message prend des tournures de combat pour le droit de tous à la liberté.
Quand je déclare une grève de la faim pour défendre la liberté d’expression, je ne le fais pas pour moi tout seul. Je revendique la liberté pour tout le monde. Et surtout ceux qui ne sont pas d’accord avec moi. Car la liberté d’expression devra être automatique envers ceux qui ne pensent pas comme nous. C’est cela la démocratie et la force d’une nation. C’est celui qui n’est pas d’accord avec toi qui devra bénéficier de ton sens de la responsabilité dans un rapport de respect de qui est l’autre. Nous sommes tous des laisseurs de traces. Comment seront alors nos empreintes demain ? Sont-elles bonnes pour les gens ou néfastes pour le développement d’une nation ? Ce sont les traces qui témoignent du passé d’un tortionnaire ou d’un militant solide. C’est dans ce sens que j’estime qu’il est de mon plein droit de demander à ce que mon art de la satire soit représenté dans les théâtres, à la télévision, que je puisse faire des films si je le veux... C’est le public qui est, en définitif, interdit. Les autorités veulent que l’on mange, que l’on parle, que l’on s’habille selon leur goût...
Pourtant vous avez toutes les portes ouvertes à l’étranger...
Vous savez qu’il est très facile pour moi d’aller dans une autre télévision arabe ou autre et avoir toutes les émissions que je veux. Je pourrais aussi prendre ce type de tribune pour dénoncer ce qu’on fait à la liberté d’expression dans mon pays. Mais je refuse qu’on me dise d’accepter l’interdiction chez moi, pour devenir un exilé satellitaire. La liberté n’est-elle trouvable que sur les satellites. Je veux le changement en gardant les pieds sur terre. Mais mon but le plus intime est de contribuer à ce qui se passe au Maroc aujourd’hui. Il est malheureux de rester dans une espèce d’impasse qui ne rime à rien. Les gens qui occupent la télévision marocaine parlent de portes ouvertes, moi aussi ma porte est ouverte. Je peux aussi demander aux gens de venir voir où je vis, de quoi je vis, comment je vis parce que je n’ai rien à cacher. C’est cela aussi le sens de la transparence. J’affirme aujourd’hui sur les colonnes de votre journal que je veux vivre libre par mon travail. Je veux présenter mon œuvre artistique devant le public et vivre décemment avec la sueur de mon front. Je veux manger un pain propre. Où est le mal dans tout cela ?
Quel impact votre situation a sur votre entourage ?
Ma fille que vous connaissez a 17 ans aujourd’hui. Ses amis lui posent des questions auxquelles elle ne peut donner aucune réponse. Aujourd’hui, je peux sortir dresser une tente dans la rue et faire ma grève de la faim. J’ai deux pièces chez moi et je partage celle de ma fille (vrai, nous l’avons vu NDLR). Donc avec ma grève de la faim, je vais encore demander l’autorisation de 4 mètres pour planter le “guiton” et j’ai le droit dans mon pays de demander ce lopin de terre pour mourir. Je ne veux ni terres ni fermes, mais je pose ici la question aux autorités sur une éventuelle autorisation de 4 mètres pour ma grève de la faim, le temps de protester contre l’interdiction. Rester vivant sans s’exprimer et faire éclore ses idées, car les idées si elles restent prisonnières de notre intérieur, elles prennent des rides et périssent. Une idée qui n’est pas fructifiée est une idée qui meurt. Et quand nos idées sont décapitées, cela veut dire que nous sommes en train de nous décomposer à petit feu.
On a l’impression que vous êtes en train de réaliser l’inéluctable...
Je sens aujourd’hui qu’on est en train de me tuer lentement. C’est une stratégie où le temps est utilisé comme cimetière de l’oubli pour perpétrer un assassinat moral tout en parlant et en dénonçant. Ils veulent que les gens se lassent et tombent dans la routine. C’est pour cela que j’ai choisi : ou bien vivre libre ou mourir libre. Est-ce que par hasard, je n’ai pas le droit de faire la grève de la faim ? Ou alors il me faudrait une autorisation ?
C’est la dernière limite ?
L’Histoire est riche d’exemples où des peuples vont à des extrêmes pour gagner leurs droits. Il y a des manifestations, des Sit-in, des soulèvements, de la grogne sociale... j’ai choisi la grève de la faim comme d’ailleurs la majorité des Marocains qui font malgré eux la grève de la faim.
Et toutes ces déclarations sur l’argent de la TVM ?
A travers la Gazette, je tiens à préciser qu’il est normal quand on fournit un effort ou un travail d’être rémunéré. Il ne s’agit ni de cadeaux ni de privilèges. Ce sont des tentatives de changer la situation de son sens noble à de simples bassesses que je ne veux même pas regarder. Et les Marocains ont le droit d’exiger des comptes pour savoir où va l’argent du contribuable.
L’histoire arabe est riche d’exemples sur la satire et l’humour...
Nos cultures arabe, musulmane et amazighe regorgent d’exemples, c’est vrai. Nous avons une longue tradition de caricature verbale. Cela fait partie de nos richesses. Aujourd’hui, on veut tuer un art aussi vif et aussi porteur de messages. C’est un crime contre notre mémoire collective. Aujourd’hui, on me prive de la mémoire de la télévision. Avec une telle richesse culturelle, nous sommes très pauvres tout de même...
Revenons un peu en arrière. Vous aviez publié un journal satirique qui a été interdit aussi dans les années 80.
Le journal avait pour titre la huppe (Al Houdhoud). Et là, à l’occasion, je défends aussi la huppe, le pauvre qui a été déplumé. Je peux aussi vous offrir quelques numéros pour la mémoire. En 81 et 82 j’ai édité 13 numéros (quel chiffre) et après j’ai fait un passage par le commissariat avec la huppe, j’ai passé dix jours quelque part. C’était riche aussi, cela avait un côté très drôle. On dit que parfois le rire peut émerger du cœur de la tragédie, c’était le cas et ça l’est aujourd’hui.
Et la satire dans tout cela ?
Quand on critique quelqu’un qui a confiance en lui, il le prend bien. Quand on dévoile certains côtés de telle ou telle personne, c’est toujours pour mettre le doigt sur ce qui ne va pas. Evidemment, quelqu’un de correct l’accepte et l’autoritaire qui aime jouer au despote se rebiffe. Quand on critique la chute des valeurs, pas celles de la bourse, mais les idéaux de la société, on met le doigt sur leur décadence, leur crépuscule et non sur ces mêmes valeurs. Quand je parle des élections, ce ne sont pas les élections en tant que valeur que je vise, mais le comment des élections. Je ne critique pas la démocratie mais le manquement à la démocratie. Quand j’ai dit que “les élections chez nous ont été falsifiées de façon transparente et honnête”, le sens est qu’il ne faudrait plus qu’il y ait des falsifications. C’est aussi simple que cela. Ce sont ceux qui n’acceptent pas l’humour qu’il faudra attaquer et non l’humoriste lui-même. C’est le monde à l’envers, qui part à la dérive. On en veut à celui qui critique la falsification et non à celui qui falsifie ! Le fin mot de l’histoire est dans cet adage d’Ibn Al Moukafaa sur cette histoire des taureaux et du lion. Un des taureaux confie devant le lion qui le prend à partie en disant : "j’ai été mangé le jour où le taureau blanc a été mangé".
La Gazette du Maroc - Abdelhak NAJIB
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