2007 : année d’espoirs pour les uns et de désespoir pour les

28 mars 2007 - 00h37 - Maroc - Ecrit par : L.A

Décidément, si 2007 est une année de tous les espoirs pour les Marocains de l’intérieur, elle est une année de désespoir pour ceux de l’étranger. En effet, les perspectives de l’augmentation du tourisme, du volume de l’investissement, des transferts CME et les consultations qui se préparent sont porteurs d’espoir pour l’ensemble des Marocaines et Marocains. Par contre, pour des raisons peu convaincantes, les trois millions de CME ne participeront pas aux élections qui se préparent. Pourtant, ils ont été invités, lors du discours royal du 6 novembre 2005, à voter et à faire leur entrée au Parlement. Restait l’espoir de l’installation du Conseil Supérieur et de la détermination de sa mission, de sa composition, de ses objectifs, etc.

Ce dossier a traversé toutes les alternances politiques et a connu tant de revirements. Son arrivé au CCDH n’est pas le fruit du hasard, elle émane de plusieurs éléments dont la volonté royale. Une arrivée qui a réveillé, chez la plupart des CME, espoir et enthousiasme de voir enfin le lancement d’un processus de concertation et de consultation le plus large possible en se distançant clairement du clientélisme et du favoritisme. Elle a véhiculé chez eux un message symboliquement fort. Mais rapidement, cette instance que l’on disait neutre et objective est en train de soulever un profond sentiment de désolation et de méfiance et nous rappelle le défi perpétuel.

Pourtant, plusieurs acteurs actifs de la communauté marocaine de l’étranger se sont jusqu’ici abstenus d’émettre des critiques pourtant justifiées et légitimes sur l’attitude du CCDH, malgré son parti pris au profit d’une minorité agissante, des nominations prononcées sans aucun critère objectif et des déclarations irresponsables de certains de ses responsables. Car contrairement à ce que disent certains responsables du CCDH, il ne s’agit pas de « coïncidences de calendrier », mais de calcul partisan. Force est de constater en effet qu’on est loin d’un processus démocratique et transparent susceptible de conduire à une concertation et un dialogue sur des bases saines et claires. Au contraire, il semble que le CCDH a fait le choix de se défaire de sa neutralité et de devenir partie prenante. Une telle chose ne peut lui permettre d’honorer les principes qui justifient et fondent sa propre existence.

En somme, le vieil adage « l’habit ne fait pas le moine » prend toute sa valeur illustrative dans ce cas-ci. Une rencontre à Rabat, même avec l’implication du CCDH et la bénédiction de certains cercles, ne peut en aucune manière satisfaire au manque de consultation et de concertation pointé du doigt par les CME. La consultation est la clef de la réussite et c’est la mission que S.M. le roi a confiée au CCDH.

Cette retenue responsable avait pour seul but de ne pas compromettre cette initiative car malgré tout, la réussite de celle-ci est au-dessus de toute considération. Mais après quelques mois de silence, la proposition de la feuille de route qui part dans un projet de débats thématiques, occultant les questions de fond est venue décevoir plus d’un CME.

Faut-il rappeler en effet, que les thèmes proposés (Citoyenneté et participation, la femme émigrée, contribution des émigrés au développement humain du Maroc, etc.) ont été appréhendés à plusieurs reprises au cours des dix dernières années ? Une appréhension attestée par la multiplication des débats et d’ouvrages, au point que l’on peut parler d’exagération. Nombreux en effet sont les débats ayant eu pour objet le vécu de l’immigration et son apport économique et social. Or il ne s’agit pas ici de débattre sur l’interaction de cette Migration et son rapport spécifique et multiforme avec son pays d’origine, les résultats de ce genre de débats existent déjà en masse.

Il s’agit en effet de la forme du conseil, de ses objectifs et de ses prérogatives par rapport au Maroc et aux pays d’accueil, de sa composition et de son fonctionnement, des modalités de participation, de la compétence des candidats et leur nombre, de la parité hommes/femmes, du cas première/nouvelle génération, du quota par pays et par régions, de son statut vis-à-vis des autorités des pays d’accueil et des consulats du royaume, de l’utilité d’avoir des antennes dans les pays d’accueil et de la définition de leur rôle, etc. Tels sont les thèmes sur lesquels devraient être consultés les CME. Car les thèmes proposés, l’ouverture d’un site Internet et l’organisation de quelques consultations, comme celle qui vient de se dérouler aux Pays-Bas, sont propres à décrédibiliser et non à conforter la crédibilité nécessaire à l’entreprise engagée.

L’installation d’un conseil supérieur est importante aux yeux de l’ensemble de la communauté marocaine de l’étranger dont la réalité est multidimensionnelle. De ce fait, la problématique de son installation ne peut être abordée avec une approche thématique stricte. En effet, il y a, au delà de ces considérations, des aspects organisationnels, structurels, opérationnels et politiques fondamentaux qui confèrent à la question un caractère stratégique.

Cette perception doit en effet s’intégrer dans une approche non parcellisée mais plus large. Car elle ne permet, ni au niveau de la réflexion, ni au niveau de la pratique et de l’action, d’isoler ou d’occulter aucune de ses dimensions ou composantes.

Le CCDH doit se conformer au discours royal. Pour ce faire, il est nécessaire de repenser la feuille de route dont le contenu est peut convaincant et qui justifie la méfiance de nombreux acteurs actifs à l’égard de ce que sera le conseil supérieur. Un conseil qui devrait répondre aux multiples attentes de la communauté en mettant en place des mécanismes lui permettant de s’associer étroitement par une mobilisation de ses diverses composantes, dans le cadre d’une vision globale.

L’option à suivre et la structure à retenir doivent, me semble t il, partir d’abord de la priorité politique fixée, de l’objectif stratégique que l’on s’assigne, et de la place que l’on accorde à cette communauté. Tous ces facteurs méritent une attention particulière et nécessitent la mise en oeuvre de mesures spécifiques reflétant l’indépendance et le pluralisme du futur conseil.

Voilà donc où en est le Royaume avec ses CME. Exclus pour le moment du code électoral, les CME font face à l’installation du Conseil supérieur de la communauté marocaine à l’étranger qui s’apparente déjà à un forum d’amis privilégiés de certains membres du CCDH. Cette manière de faire risque de faire gâcher au CCDH tout le capital confiance qu’il a su cumuler par ses actions passées.

Said Charchira
Directeur du centre européen d’études et d’analyses sur la Migration

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Vote MRE - Elections - Conseil consultatif des droits de l’homme - Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) - MRE

Ces articles devraient vous intéresser :

Appel à mettre fin à l’échange d’informations fiscales des MRE

L’Organisation démocratique du travail (OMT) a vivement critiqué la politique gouvernementale à l’égard des Marocains résidant à l’étranger, pointant du doigt une approche jugée superficielle et occasionnelle, particulièrement lors de l’accueil des MRE...

Le MRE a-t-il le droit de vendre sa voiture au Maroc ?

Le Marocain résidant à l’étranger (MRE) a tout à fait le droit de vendre son véhicule lors de ses vacances au Maroc. Nous parlons, ici, de la période de l’admission temporaire de 6 mois, autorisée par les services de la Douane. Deux situations se...

Maroc : les duty free font leur révolution

Du changement en vue pour les magasins de vente sous douane, communément appelés « Duty free shops ». L’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) et l’Office des changes ont fixé de nouvelles règles relatives à leur gestion et fonctionnement.

Les Marocains du monde, au cœur d’une importante réunion à Rabat

Le Premier ministre marocain, Aziz Akhannouch, a présidé la dixième réunion de la Commission ministérielle dédiée aux Marocains résidant à l’étranger (MRE)à Rabat hier, jeudi. Dans le cadre de cette réunion, il a mis en avant l’engagement du...

MRE : Vacances gâchées par des tracasseries administratives

C’est avec un sentiment mêlé de lassitude et de colère que les Marocains résidant à l’étranger (MRE) vont commencer à débarquer dans les ports marocains dans les prochains jours.

Transferts des MRE : les assurances d’Abdellatif Jouahri concernant une directive européenne

Les autorités marocaines vont engager des négociations avec la Commission européenne au sujet d’une directive européenne visant à restreindre les transferts de fonds des Marocains résidant à l’étranger (MRE), a récemment annoncé Abdellatif Jouahri, le...

Les Marocains du monde ont transféré 110 milliards de dirhams en 2022 (+16,5%)

Les transferts d’argent effectués par les Marocains résidant à l’étranger (MRE) ont connu une augmentation significative en 2022, selon les données publiées par l’Office des Changes.

MRE : Peut-on importer une voiture de location au Maroc ? 

La douane marocaine vient de publier une nouvelle version de son guide dédié aux Marocains résidant à l’étranger. Une section dédiée à l’importation par les MRE des voitures de location. Qu’en est-il ?

Le Maroc mise sur ses compétences à l’étranger

Le Maroc veut impliquer davantage ses compétences à l’étranger à son processus de développement. Dans ce sens, un mécanisme est en cours d’élaboration pour accompagner les talents marocains à l’étranger, conformément aux orientations royales.

Les joueurs binationaux, une fierté et une force pour le Maroc

Le Maroc doit en grande partie son parcours historique à la coupe du monde au Qatar à ses joueurs binationaux comme Achraf Hakimi, Hakim Ziyech, Sofyan Amrabat, Noussair Mazraoui, Abdessamad Ezzalzouli, Bilal El Khannouss, Sofiane Boufal, etc., qui ont...