Maroc : les femmes divorcées appellent à la levée de la tutelle du père

23 mai 2023 - 11h00 - Maroc - Ecrit par : P. A

Avant l’établissement de tout document administratif pour leurs enfants, y compris la carte d’identité nationale, les femmes divorcées au Maroc doivent avoir l’autorisation du père. Elles appellent à la levée de cette exigence dans la réforme du Code de la famille.

Dans le cadre de la campagne nationale « #BghathaLwa9t », une femme divorcée et mère de trois filles raconte sa souffrance. Depuis six ans, elle est obligée de demander l’autorisation de son ex-mari et père des enfants pour leur établir tout type de document administratif. « Cela fait six ans que j’essaye de composer avec cette situation. Je dois appeler mon ex-mari et attendre son autorisation pour avoir des documents comme l’acte de naissance et le passeport, sachant que c’est moi qui veille sur l’éducation et la transmission des valeurs à mes trois filles », confie-t-elle dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux et citée par Le Matin.

À lire : Réforme du Code de la famille : voici les modifications majeures attendues

Mounia raconte son indignation lorsqu’on lui a demandé l’autorisation ou la présence du père avant de déposer la demande de la carte d’identité nationale (CIN) pour l’une de ses filles. La femme a dû saisir le tribunal et prouver son refus avant que le dossier de sa fille ne soit accepté. « Je ne comprends pas pourquoi ce détour, sachant que la carte d’identité est un droit constitutionnel et pourquoi toute cette discrimination envers la maman. Pour le passeport, je peux comprendre, mais pour la CIN, je ne vois vraiment pas l’importance de l’intervention du père », se désole-t-elle.

À lire : Maroc : des personnalités appellent à un Code de la famille plus égalitaire

Mounia a lancé une pétition pour susciter une réforme du Code de la famille sur ce point discriminant envers les mères divorcées, rappelant que ces dernières peuvent valablement demander des papiers administratifs de leurs enfants sans nécessairement obtenir au préalable l’autorisation du père. Mais cette réalité ne changera pas tant que le Code de la famille (Moudawana) ne sera pas revu. L’article 230 du Code accorde le droit de la garde à la femme en cas de divorce, et la tutelle systématiquement au père. Une injustice qu’elles demandent de corriger.

À lire : Maroc : la réforme du Code de la famille fait toujours jaser

Plusieurs femmes comme Mounia affirment être « confrontées à des articles de lois injustes », assure Karima Rochdi, journaliste et membre du bureau du Collectif 490, initiatrice de la campagne « #BghathaLwa9t » dont l’objectif est de sensibiliser à la nécessité de réformer le Code de la famille et le Code pénal pour mettre fin aux discriminations envers les femmes. Pour sa part, Younes Naoumi, avocat au barreau de Casablanca, estime que la réforme du Code de la famille est un impératif, car il est inconcevable aujourd’hui que la mère n’ait pas le droit de prendre des décisions sur le plan administratif pour son enfant.

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Moudawana (Code de la famille) - Femme marocaine - Enfant

Aller plus loin

Passeport pour les enfants : les Marocaines n’ont plus besoin de l’autorisation du père

Le ministère de l’Intérieur lève l’obligation pour la mère (femme marocaine) de solliciter l’autorisation du père pour l’obtention ou le renouvellement du passeport marocain au...

Maroc : Les femmes toujours "piégées" malgré des avancées

Le Maroc fait partie des pays de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord qui travaillent à mettre fin aux restrictions à la mobilité des femmes, mais certaines...

Réforme du Code de la famille : voici les modifications majeures attendues

Le roi Mohammed VI a annoncé récemment à la réforme du Code de la famille, près de 20 ans après son adoption, en vue d’instaurer davantage d’égalité entre les hommes et les...

Code de la famille : près de 8 Marocains sur 10 pour une réforme basée sur le charia

À l’heure où la réforme du Code de la famille fait débat, un sondage réalisé par Afrobaromètre révèle que près de 8 Marocains sur 10 appellent à une réforme basée sur la loi...

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : un « passeport » pour les nouveaux mariés

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) appelle à la mise en place d’un « passeport » ou « guide » pour le mariage, dans lequel seront mentionnées les données personnelles des futurs mariés, ainsi que toutes les informations sur leurs...

Le mariage des enfants légalisé au Maroc ? une photo sème le doute

La publication d’une image montrant des fillettes prétendues marocaines en robe de mariage tenues par la main par des hommes âgés est devenue virale sur les réseaux sociaux. Certains affirment que cela s’est produit au Maroc. Qu’en est-il vraiment ?

Maroc : plus de droits pour les mères divorcées ?

Au Maroc, la mère divorcée, qui obtient généralement la garde de l’enfant, n’en a pas la tutelle qui revient de droit au père. Les défenseurs des droits des femmes appellent à une réforme du Code de la famille pour corriger ce qu’ils qualifient...

Code de la famille : les féministes marocaines face à l’opposition de Benkirane

Le secrétaire général du Parti justice et développement (PJD), Abdelilah Benkirane, a vivement critiqué le mouvement féministe qui milite pour l’égalité des sexes dans le cadre de la réforme du Code de la famille, estimant que son combat vise à...

L’humoriste Taliss s’excuse après avoir insulté la femme marocaine

L’humoriste Taliss de son vrai nom Abdelali Lamhar s’est excusé pour la blague misogyne qu’il a faite lors d’une cérémonie organisée en hommage aux Lions de l’Atlas qui ont atteint le dernier carré de la coupe du monde Qatar 2022. Il assure n’avoir pas...

Réforme du Code de la famille au Maroc : Abdelilah Benkirane menace

Le secrétaire général du PJD, Abdelilah Benkirane, relance le débat sur la réforme de la Moudawana et du Code pénal, en promettant des actions fortes si le ministre de la Justice y introduit des amendements qui portent atteinte à la cellule familiale.

« Tu mourras dans la douleur » : des féministes marocaines menacées de mort

Au Maroc, plusieurs féministes, dont des journalistes et des artistes, font l’objet d’intimidations et de menaces de mort sur les réseaux sociaux, après avoir appelé à plus d’égalité entre l’homme et la femme dans le cadre de la réforme du Code de la...

Maroc : les femmes divorcées réclament des droits

Au Maroc, les appels à la réforme du Code de la famille (Moudawana) continuent. Une association milite pour que la tutelle légale des enfants, qui actuellement revient de droit au père, soit également accordée aux femmes en cas de divorce.

La justice espagnole sépare une famille marocaine : Nasser Bourita réagit

Suite à la décision de la justice espagnole de retirer la garde des enfants à une famille marocaine établie dans le nord du pays, le ministère des Affaires étrangères a tenu à commenter cette décision et fournir quelques détails.

Le droit des femmes à l’héritage, une question encore taboue au Maroc

Le droit à l’égalité dans l’héritage reste une équation à résoudre dans le cadre de la réforme du Code de la famille au Maroc. Les modernistes et les conservateurs s’opposent sur la reconnaissance de ce droit aux femmes.