Le mariage, entre blocages et désespoir

24 février 2007 - 00h00 - Maroc - Ecrit par : L.A

Dur, dur pour la jeunesse marocaine de ne pas suivre l’air du temps en atière de mariage ou de célibat. Plusieurs jeunes, sexes et âges confondus, sont très portés sur le procédé « s’essayer d’abord » pour « s’adapter ensuite ». D’autres, très respectueux de la tradition, attendent leur destin, qui se fait trop désirer à leur goût pour tomber sur la perle rare. Une autre minorité se complaît dans le célibat et a une très mauvaise idée sur le mariage.

Malgré une augmentation de 11% du taux de mariages en 2006, annoncée par le ministre de la Justice, Mohamed Bouzoubaâ, il ne faut pas crier victoire trop vite.

Certes, le nombre des actes de mariage contractés par la femme majeure s’est élevé à 60.095 contre 49.175 en 2005, mais il n’empêche que le constat est palpable, selon des témoignages recueillis auprès de plusieurs jeunes âgés de 25 à 38 ans : le mariage au Maroc est en perte de vitesse. Il en est, bien évidemment, des cas spécifiques de couple qui, n’ayant pas de problème financiers, ni de contraintes fortuites à signaler, vont convoler en justes noces le plus rapidement possible. A titre d’exemple, les personnes ayant une bonne situation avec poste de cadre supérieur, les cas de mariages arrangés entre les familles richissimes ou juste aisées ou encore les personnes vivant dans le monde rural sans tracas pécuniaire particulier, ne trouvent pas de complication à passer devant le Adoul.

En revanche, quid des gens qui ont beaucoup de mal à joindre les deux bouts même en étant encore célibataire sans aucune responsabilité ? Comment peuvent-ils dépasser ces obstacles d’argent qui leur paraissent tellement insurmontables ? Comment rencontrer la personne idoine qui voudra partager les différents crédits obligatoires pour pouvoir prétendre fonder une famille ?...

Les interrogations fusent de partout et les jeunes célibataires désirant se marier commencent à perdre espoir et à lâcher du lest. Certaines jeunes femmes âgées de 25 à 35 ans nous ont confié qu’elles ont revu les critères de sélection de l’éventuel mari à la baisse. « Au début j’étais trop sélective et même trop restrictive. Celui-ci est hideux, chauve, bedonnant, pauvreŠJe ne voyais que les points négatifs et les défauts de la personne et hélas je ne m’attardais jamais sur les qualités ! Aujourd’hui, je m’en mords les doigts. Ma mère m’avait bien avertie que cela risquait de se produire. Mais étant si jeune, j’espérais un très bon parti et je nourrissais de grands espoirs que je vois maintenant anéantis », nous a révélé sur un ton maussade, Nadia, commerciale à Rabat, 32 ans.

Souâd, n’a pas vécu cette même situation avec plusieurs prétendants pas compatibles selon elle. Toutefois, son statut de célibataire à 35 ans ne lui convient pas du tout. Cette assistante de direction dans une société à Casablanca se demande où chercher pour trouver un gentil époux. « Je n’ai pas d’exigences précises pour mon futur mari. Tout ce que je demande, c’est d’avoir la chance de tomber sur une personne de normale qui n’a pas de problèmes particuliers incurables. », avoue-t-elle désespérée.

Entre vieux garçon et célibataire invétéré

Le témoignage des hommes, par contre, est plutôt mitigé. Certains pensent que leur statut de célibataire leur est envié par les mariés mais plusieurs d’autres subissent, à l’image de quelques femmes, les affres du vieux garçon !

« Je vis mon célibat comme la varicelle. Cet un état permanent de brûlure, piqûre et démangeaison, et j’attend que ça passe ! Pas toujours évident et assez difficile puisqu’on se dit que ce n’est qu’une période passagère ! Mais bon, avoir une épaule pour laisser reposer sa tête, c’est tout de même bien agréable...Et franchement, j’ai hâte de me marier mais je n’ai pas encore trouver LA bonne personne. J’ai peur que soit juste une illusion et que je finisse vieux garçon ! », nous a dit Karim, 38 ans, employé.

Abdelaziz, comptable, 36 ans, n’a pas le même son de cloche. Considéré comme étant un célibataire invétéré, ce dernier nous a expliqué qu’il se console largement en voyant les couples qui restent ensemble par habitudes ou autres (enfants, crédits....) et qui sont plus malheureux en amour que les autres célibataires qui n’ont pas de compte à rendre et sont libres comme l’air. « J’ai toujours été grand fan de la maxime « Vaut mieux être seul(e) que mal accompagné(e) ! ». Et tant que je n’ai pas trouvé la femme idéale qui sache m’impressionner vraiment et qui corresponde à certains critères (beauté, intelligence, gentillesseŠ), je ne suis nullement pressé et ça ne me dérange aucunement de mourir célibataire. », a-t-il ajouté.

Au Maroc, la façon de vivre, le comportement de plusieurs personnes sont très influencés par tout ce qui est européen. Du fait, d’une proximité géographique de l’Europe, mais aussi de tout l’historique de colonisation qui a fait que les relations très privilégiées avec l’Europe sont restées et particulièrement avec la France et l’Espagne. Par conséquent, les marocains sont bien informés de ce qui se passe dans ces pays et sont aussi très bien exposés aux nouvelles technologies. Ces paramètres jouent également un rôle dans la prise de décision de certains jeunes qui sont partagés entre modernité et tradition. Vouloir être libre comme un européen en vivant en concubinage d’abord avant de passer au stade du mariage est également une option choisie par plusieurs jeunes trentenaires.

Al Bayane - Meyssoune Belmaâza

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Sujets associés : Famille - Moudawana (Code de la famille) - Mariage

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