Les échanges commerciaux entre le Maroc et la Belgique au point mort

18 avril 2008 - 13h26 - Belgique - Ecrit par : L.A

Vu du Maroc, la Belgique est synonyme de l’Union européenne, et pour ceux qui aiment les clichés, de frites, chocolat, la bière et les fréquentes querelles communautaires entre Flamands et Wallons. La forte diaspora marocaine implantée dans ce pays, 400.000 personnes dont des binationaux, pouvait pourtant servir de vecteur de connaissance mutuelle. A l’évidence, il n’en est rien.

Côté marocain comme belge, les efforts de communication actuels ne suffisent pas. En Belgique, et L’Economiste l’a constaté en préparant ce dossier, les réformes entreprises par le Maroc au niveau du politique et de l’ouverture de la société ne sont presque pas connus. Encore moins, le dynamisme actuel de l’économie du Royaume et les opportunités d’investissement qu’elle peut offrir aux investisseurs et aux entreprises implantées en Belgique. La diplomatie économique dont se vante tant le ministère marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, est au niveau zéro, du moins en Belgique. Cette absence est d’autant plus dommageable que ce pays, petit par la taille (10 millions d’habitants) est un formidable tremplin de rayonnement international par sa capitale.

Quartier général de l’Union européenne, Bruxelles, 20% du PNB belge, un million d’habitants de 200 nationalités différentes, concentre les sièges de plusieurs institutions internationales et des hub régionaux de grands groupes mondiaux. Après NewYork, c’est également la deuxième métropole diplomatique dans le monde. Y assurer une présence active est donc d’un enjeu capital. Par ailleurs, par la « magie » du fonctionnement de son architecture institutionnelle, le dynamisme de ses PME, la discrétion de sa diplomatie et son rang dans l’Union européenne, la Belgique est un acteur important pour le Maroc.

A bien des égards, elle peut inspirer des réformes que l’on entreprend de ce côté de la Méditerranée. Le principe de subsidiarité qui préside à la gestion des affaires publiques est, là-bas, une réalité permanente. Ce qui permet de prendre les décisions qui soient le plus proches possible des attentes des citoyens. Au passage, le périmètre entre ce qui doit relever du niveau fédéral et des Régions est un sujet politique constant dans le plat pays. Le sujet est tellement passionnel et brûlant qu’il a fallu neuf mois à la coalition actuelle au gouvernement fédéral pour trouver un compromis. Et malgré ce blocage que relayait les médias internationaux sur les risques d’implosion de ce Royaume, l’économie a continué à fonctionner normalement. C’est une preuve de la qualité des fondations de son schéma institutionnel et de l’efficacité de sa technocratie administrative.

La subsidiarité totale

La subsidiarité signifie par exemple que l’éducation est du ressort des compétences des communautés. Transposée dans la réalité marocaine, cela consisterait à placer la lourde machine de l’enseignement sous la responsabilité des Régions. Peut-être que cela pourrait enfin donner à cette institution de la visibilité qui lui fait cruellement défaut auprès de l’opinion publique. Basée essentiellement sur un tissu de PME innovatrices et flexibles, l’économie belge est un modèle d’ouverture. La notion très chauvine de champions nationaux est inconnue dans le logiciel des responsables politiques, l’essentiel étant l’efficacité.
Des PME belges se comptent par centaines aujourd’hui dans ces domaines d’excellence et constituent l’un des piliers de l’économie.

Toujours dans les services, en très peu de temps, Anvers et Bruxelles sont devenues des métropoles de la mode grâce à un vivier de stylistes doués et un système éducatif en alerte permanente. Dans la capitale belge, il s’est également développé toute une activité qui gravite autour de l’industrie de l’audiovisuel. La création publicitaire, la production des films, etc, une noria de PME contribue à l’éclosion de ce secteur très créateur d’emplois et d’expertises. La qualité de son infrastructure est aussi un des points forts de Bruxelles. Son réseau d’établissements hospitaliers fait de la ville un des hauts lieux du « tourisme médical ». Elle absorbe une partie des listes d’attente des pays voisins et reçoit des patients qui viennent surtout des pays pétroliers du Moyen-Orient. Le niveau des relations politiques maroco-belges est pour l’instant, plusieurs crans en dessous des échanges commerciaux entre les deux pays et de la densité de la coopération bilatérale. Selon les données de l’Office de Change, les importations marocaines en provenance de l’Union belgo-luxembourgeoise se sont élevées à 4,7 milliards de dirhams en 2007. L’intérêt grandissant des investisseurs belges pour le Maroc devrait inverser la donne. Thomas & Piron est l’un des acteurs majeurs du plan Azur (à Mogador et Lixus à Larache), Besix à TangerMed et sur la station d’El Jadida. A noter aussi, plusieurs PME actives dans le textile.

« Partager les intérêts communs »

Par Patrick Vercauteren Drubbel, ambassadeur de Belgique au Maroc

Les liens tissés entre nos deux Royaumes, le Maroc et la Belgique, sont intenses et excellents. Pour s’en convaincre, il suffit de prendre en considération la visite d’Etat que Leurs Majestés le Roi Albert II et la Reine Paola de Belgique ont effectuée au Maroc il y a quatre ans, ainsi que le nombre élevé de visites officielles, de part et d’autre, et l’intérêt que chacun de nos deux pays porte à l’autre.

Nos relations sont fructueuses et couvrent de nombreux domaines. Le Maroc est tout d’abord un partenaire privilégié de la coopération belge au développement, portant sur des matières touchant la vie quotidienne : l’eau, l’agriculture ou encore la formation utilisant comme ligne les orientations de l’Initiative sociale de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, c’est-à-dire l’Initiative nationale de développement humain.

Partant du domaine social, les niveaux de coopération se sont fortement diversifiés, abordant désormais les domaines culturel, économique, commercial, consulaire, militaire, sécuritaire et, plus récemment encore, le renforcement de la coopération judiciaire par la désignation d’un magistrat de liaison dans nos deux Etats.

Ces liens privilégiés se sont traduits par l’instauration, en mars 2007, de la première Haute commission mixte de partenariat entre le Maroc et la Belgique, sous la présidence des deux Premiers ministres. Seuls la France, l’Espagne et le Portugal possèdent une telle instance commune avec le Maroc. Limités jusqu’à il y a peu, les investissements belges ont été récemment dynamisés, dans le cadre du plan Azur, du plan Emergence, des grands travaux d’infrastructure dont le nouveau port de Tanger Med. Nos échanges commerciaux ont enregistré ces deux dernières années une progression sensible. L’importance de la Communauté marocaine de Belgique, forte de près de 400.000 personnes, et son intégration au tissu social, économique, culturel et politique belge, sont fréquemment relevées. La Belgique est souvent citée comme modèle d’intégration de la diaspora marocaine.

De son côté, la communauté belge au Maroc est extrêmement active. La Belgique y compte des entrepreneurs belges, des ingénieurs, des directeurs d’école, des artistes, artisans, ... Parmi eux, de nombreux couples mixtes. Preuve d’un autre lien fort entre nos deux pays…
Tant au Maroc qu’en Belgique, une redécouverte l’un de l’autre est en cours qui permettra à chacun de nos pays de poursuivre ses relations basées sur la confiance, le respect, le dialogue et la coopération.
Cette nouvelle approche est appuyée par l’immense majorité des habitants de nos deux pays. Elle exprime surtout une nécessité réciproque de partager des intérêts communs profonds et de faire évoluer nos sociétés d’une multiculturalité croissante en une véritable interculturalité.

Source : L’Economiste - Abashi Shamamba

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Sujets associés : Belgique - Coopération - Investissement - Politique économique - Office des changes

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