Portrait de Farid Taha

16 octobre 2006 - 10h01 - Maroc - Ecrit par :

Des milliers de médecins d’origine étrangère exercent en France, dans des conditions précaires. Farid Taha, chirurgien français né au Maroc, a longtemps été l’un d’eux. Il a bataillé plus de dix ans avant d’être reconnu comme médecin. Un parcours exemplaire.

« Devenu chirurgien, j’opérais des gens. Je ne pouvais pas leur dire que mon diplôme n’était pas reconnu en France ou que je gagnais 6 ou 7000 F par mois ! »

Le Docteur Farid Taha, 44 ans, sourit amèrement quand il raconte ses années de galère. Diplômé au Maroc, il a lutté pour faire reconnaître ses titres en France. Aujourd’hui, ce chirurgien exerce à l’hôpital de Compiègne et au CHU d’Amiens. Il fait partie de l’équipe du professeur Devauchelle qui a réalisé la première greffe du visage. « J’ai fini par être reconnu comme médecin après douze ans de parcours administratif et de multiples examens », résume-t-il.

Son histoire débute à Rabat, au Maroc où il est né. Il étudie la médecine de 1980 à 1989. Doctorat en poche, il choisit une spécialité : la chirurgie maxillo-faciale. Pour cela, il doit s’expatrier. « Naturellement, j’ai choisi la France, le pays culturellement le plus proche. Mais dès mon arrivé, je me suis heurté à un mur. Je venais d’avoir mon doctorat. J’étais fier. Et on m’explique que mon diplôme ne vaut rien. »

Parcours du combattant

Commence alors un parcours du combattant. Spécialisation, concours d’équivalence : Farid Taha obtient de nouveaux diplômes. En parallèle il exerce sa spécialité. Mais il n’est toujours pas reconnu comme médecin. « Ce n’est qu’en 2000, après 12 années de galère, que j’ai enfin obtenu le droit d’exercer la profession de médecin. Forcément, ça forge une personnalité, des convictions et un engagement… »

Cet engagement, il le vit au sein de FPS (Fédération des Praticiens de Santé), qui défend les médecins d’origine étrangère (hors Union Européenne). 7000 médecins étrangers exercent en France avec un diplôme obtenu hors UE. Parmi eux, « 3 000 médecins à diplôme étranger sont employés illégalement, faute de statut officiel », selon l’Express (novembre 2004).

Engagement politique

Le 21 avril 2002, Le Pen est au deuxième tour de la présidentielle. « Ca a été une claque. J’avais voté Jospin. Il représentait à l’époque une rigueur morale et une authenticité sans équivalent ».

Farid Taha décide de s’engager dans un parti. « Etant de formation scientifique, j’ai étudié leurs programmes. Et j’ai voulu rencontrer des représentants locaux. » Et là, nouvelle désillusion. Au PS et à l’UMP, personne ne prend le temps de le recevoir. Mais à l’UDF l’accueil est meilleur.

« Là, on m’a écouté et on a compris ma demande qui était de m’impliquer et d’agir. J’ai été bien reçu. J’ai participé aux débats. Sur certains sujets, je n’étais pas d’accord avec les gens, mais ils étaient ouverts au dialogue. »

En 2003, il est désigné Conseiller national de la fédération de l’Oise. Il s’implique au niveau local. La prochaine étape sera les législatives. « Je serai candidat aux législatives si la commission d’investiture de l’UDF accepte ma candidature. Siéger à l’Assemblée est mon souhait car j’estime qu’aujourd’hui personne ne me représente. Nombre de citoyens ne sont pas représentés. Donc, je vais y aller à ce titre là. »

Blog et parole confisquée

Il anime un blog. « Quand une personne qui a un engagement politique arrive au stade ultime de créer un blog, c’est qu’elle estime que sa parole est confisquée », estime-t-il. « La France est le pays où il y a le plus de blogs. On s’en réjouit. Moi ça m’attriste, ça veut dire que les citoyens sentent que leur parole n’est pas écoutée. »

Farid Taha mène des actions culturelles. Il a organisé une exposition de sculptures, chez lui, dans le prieuré du moyen âge qu’il restaure. « Je suis musulman mais je me sens investi d’une mission de sauvegarde de ce patrimoine chrétien. Je m’inscris dans la logique des sages musulmans qui protégeaient les lieux de cultes musulmans mais aussi non musulmans. »

Non au communautarisme

Il déplore la façon dont les médias parlent de l’islam. « On ne montre que des musulmanes avec des voiles. Si on parle de l’Iran, on filme des visages convulsifs en train de hurler. Alors qu’il y a des scientifiques et des gens très différents du personnage qui est à la tête de l’Iran. »

Il ajoute : « Je suis contre le communautarisme. En France, les communautés se sont faites par le logement. On a regroupé des gens dans des quartiers. J’ai subi cela. Quand je cherchais un logement, les offres qu’on me proposait, c’était toujours dans les mêmes quartiers, en dépit de l’évolution de ma fonction et de mes revenus. »

Source : lemondecitoyen.com

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